L’ART DÉCORATIF peintre de fleurs, de nus, d’enfants, de scènes modernistes, de portraits, M. Renoir s’impose à la déférence reconnaissante de son pays par l’obstination de son labeur, par l’originalité de sa vision, par sa réunion des dons fonda-mentaux de son art. N’ayant pas désiré faire son panégyrique, nous n’avons pas hésité à parler de ses défauts, et il serait ridicule de feindre de penser qu’un créateur, quel qu’il soit, en est exempt. Mais il faudrait s’entendre sur la définition d’un défaut, et distinguer entre ceux qui trahissent l’intention et ceux qui l’exagèrent, entre les défauts de médiocrité et les défauts de surabondance. M. Renoir, en tous cas, ne présente que ces derniers, et il les partage avec tous les impressionnistes. Le critiquer revient à critiquer l’impression-nisme lui-même. Or, aujourd’hui où nous sommes éloignés des polémiques et des éloges outranciers, nous pouvons considérer ce mouvement comme un des plus vivaces et des plus remarquables qui se soient produits depuis les débuts de l’école française, et nous appuierons cette opinion non plus sur des sympathies protestataires au nom du principe de la liberté artistique, mais sur des consta-tations de faits et d’oeuvres. L’impression-nisme a apporté une conception nouvelle du chromatisme dont les conséquences seront énormes, et une conception nouvelle de la psychologie et de la composition. Il s’est fait, avec autorité, originalité et franchise, l’histo-riographe d’un temps. Il a régné quarante ans et influé sur deux générations, et son influence, au lieu de s’affaiblir, se fortifie. Il a présenté au monde artistique cinq ou six tempéraments de tech-niciens investis de dons supérieurs. Enfin, il est remonté, d’un vio-lent et courageux effort, aux sources originelles du génie national, en réagissant contre l’aca-démisme, essentielle-ment international. C’est un bilan assez riche pour ne pas re-douter l’examen de l’avenir , et permettre à ses admirateurs l’aveu loyal de ses imperfec-tions, de ses partis-pris, dont beaucoup ont été les consé-quences immanquables des forcenés dénis de justice qu’on ne lui a pas épargnés. L’impressionnisme a dépensé la moitié de ses forces à prouver à ses adversaires qu’ils erraient, et l’autre à inventer des procédés techniques : il n’est pas étonnant qu’il ait manqué de profondeur intellectuelle, et qu’il ait laissé à ses succes-A. RENOIR LA FEMME AU CHAPEAU 226 FIND ART DOC