FÉVRIER 1902 L’OEUVRE D’AUGUSTE RENOIR T peut- etre seulement au-jourd’hui, à peine depuis deux ou trois anisées, que la critique peut apprécier im-partialement en l’impressionnisme le dernier grand mouvement pictural fran-çais -du ‘XIX, siècle. C’est aujourd’hui seulement qu’elle peut en présenter la synthèse , devant le silence des polé-miques et des enthousiasmes extrêmes. Déjà une partie des peintres nouveaux ont respec-tueusement montré leur désir de réaction, comme, en musique, les élèves de Franck à l’égard du wagnérisme, et une autre partie, au contraire, a développé certaines indicationschro-matiques données par Manet et ses amis. L’im-pressionnisme entre dans l’histoire de notre art national, et y inscrit un chapitre splendide. Il était né du réalisme, et s’était épanoui dans la féerie de la couleur : son origine réaliste a été touchée par la caducité, son innovation chroma-tique est une admirable source de progrès. Le da h sine de Manet, succé-dant à celui de Courbet, était une protestation contre le faux idéalisme académique, et nous lui devrons d’avoir porté les plus rudes coups à ce fatal idéalisme néo-italien et pseudo-grec de la beauté canonique, im-portation encouragée par l’École de Fontainebleau, Louis XIV et l’École de Rome importation intruse dans le génie français. C’est là un service capital rendu aux peints-es par leurs aînés, mais son caractère est ci, constanciel, et l’objet des luttes auxquelles Manet usa une partie de sa vie ne nous pas-sionne plus certaines de ses allégations nous apparaissent exagérées, comme toute assertion Protestataire au bout d’un certain délai. Attaques et défenses nous semblent nécessai-rement excessives. C’est le droit de la pos-térité de ne pas tenir Hernani pour un chef-d’oeuvre et de ne pas ratifier le dédain de Hugo pour Racine, parce qu’elle n’a plus à combattre Delavigne ni à choisir entre Her-nani et les productions de Baour-Lormian. C’est aussi son droit de dépasser de tout A. RENOIR 173 SUR LA ‘l’ERRASSE