L’ART DÉCORATIF tisme. Il choisit pour ses variations un thème qui lui semble amusant e: qui l’est en effet. Quoi qu’il en soit, M. de Feure, peintre, est de ceux dont on attend en tout quelque chose d’un peu déconcertant, et ceux qui ne le connaissent que par ses toiles peuvent être surpris de le voir, chez, lui, dans un intérieur où tout respire la sagesse. Il t a loin de cet intérieur à ceux où l’on se couplait, sous prétexte de modernisme, à saille bizar-reries dans la forme des meubles et de l’architecture intérieure. Le maitre de la maison ne s’est pas cru tenu, pour taire honneur it sa qualité d’apôtre de la renais-sance des arts décoratifs — et l’un des plus brillants — de chercher en tout midi à qua-torze heures, comme on dit. Rien n’a moins de prétentions à étonner le spectateur que ces meubles formés — comme tous les bons meubles — de cadres rectangulaires où les panneaux s’enchâssent, et ces sièges dans les-quels on ne remarque d’abord rien de parti-culier, précisément parce qu’ils sont bons et commodes. N’étaient quelques détails de sculpture, très sobrement distribués, où la puissante imagination de l’artiste a posé son empreinte, on pourrait presque dire que cc sont des meubles assez ordinaires; et je crois qu’il est bon de le dire, car il ne faut pas laisser passer d’occasions de combattre l’idée qu’une foule de gens se sont faite du modernisme dans les arts appliqués, c’est-à-dire que le moderne doit être quelque clause qui renverse toutes les habitudes. Il n’y a pas de croyance qui retarde plus le progrès que celle-là; elle a pour résultat de dégoûter le public de toute innovation en ne favorisant que les plus extravagantes. Oppo-sons à ce fâcheux préjugé l’exemple offert par les novateurs chez qui la folie du neuf à tout prix n’obscurcit pas le talent, et parmi ceux-ci, l’un des plus hardis, M. de Feure. Ici, la simplicité de forme des meubles a son complément dans la division harmo-nique des murs, qui se combine avec eux. Les images rendant compte de ceci, il est nautile de m’y étendre. En somme, lambris-sage, cadres des portes, cheminée (inachevée et momentanément masquée par une armoire-étagère; forment un ensemble avec les meubles; les uns complètent les attires. La pièce étant très haute, comme tous les ate-liers d’artistes, on a pris le parti d’établir la ligne terminale des boiseries fixes à la hau-teur du faite des grands meubles, et Con a évité la monotonie résultant de la suppres-sion des accidents formés, habituellement, par la saillie des meubles au-dessus du lam-brissage en infléchissant cette ligne en ar-cades très allongées. Ota ne manquera pas de remarquer Pesti-eine sobriété de la décoration murale peinte sur le fond blanc des murs. Le sys-tème décoratif, qu’on retrouve dans d’autres parties de la demeure de M. de Feure, se réduit à cerner soit le contour de chaque pan de mur, soit même seulement sa base ou son faite, par une mince ligne de couleur de laquelle se détachent, aux angles et aux points indiqués par quelque particularité de la construction, de petites masses de feuilles ou de fleurs très stylisées. Certes, personne n’aurait pu plus facilement que M. de Feure revêtir ces murs d’une décoration plantu-reuse; s’il ne l’a point fait, il est clair que c’est parce qu’il y est opposé en principe. Le cas de ce maitre de la couleur dédaignant — en apparence d’user de ses ressources est piquant; j’ai eu la curiosité de demander à M. de Feure quelles sont ses idées là-dessus. L’artiste dit qu’il faut avani tout que la dé-coration ne trouble pas la forme architectu-rale; pour cela, la première doit suivre la seconde de près. Il admet qu’en réduisant la couleur à une ligne trop grêle sur la plus grande partie du périmètre, il exagère peut-être le principe, et qu’a cet égard l’applica-tion qu’il fait de celui-ci peut être améliorée. Mais il veut que le tau cerné par la décoration reste le plus grand possible : «Une surface blanche régulière, par exemple une page de livre, c’est beau s, ainsi s’exprime-t-il. Ceci paraitra singulier, mais je le comprends très bien pour ma part, quoiqu’il nie soit difficile d’en définir la raison. Les Hollan-dais, qui sont un peuple amoureux de la couleur et dont l’école de peinture a pro-duit tant de grands coloristes, aiment le blanc; il n’est même pas impossible que leur propreté proverbiale soit une nécessité ré-sultant du t’ait que tout est blanc ou peint es blanc chez eus ils n’aiment pas le blanc parce qu’ils sont propres, mais ils sont propres parce qu’ils aiment le blanc. Or, M. de Feure a le sang hollandais par l’un de ses ascen-dants. .46 FIND ART DOC