L’ART DÉCORATIF Mais les influences de la mode artiste ont elles-mêmes des causes plus profondes: tou-jours une action régionale dans l’art manifeste une action plus profondément humaine, qui l’explique. Barcelone en est la preuve. Si, parmi tous les grands centres, la peinture espagnole a choisi celui-là surtout pour renaître, c’est que, dans ce coin d’Espagne, si particulier, l’idée fermente; un n mouvement catalaniste» a défini lui-même son objet : réveiller l’esprit catalan ‘. Par le pinceau de ses artistes comme par la bouche de ses orateurs, la Catalogne prêche la décentralisation, revendiquant la vie pour sa pensée, son dialecte et son art. Si vous enten-diez le chant des Segadors, le chant des Mois-sonneurs, qui est une Marseillaise catalane, vous devineriez aussitôt pourquoi la peinture revit à Barcelone. La Catalogne est la Finlande de l’Espagne. Aussi bien la statistique vint-elle de bonne heure corroborer les pressentiments. Les chiffres seuls suffiraient à dénoncer vite une renaissance. V. Le Mouvement catalaniste, par Louis-Xavier de Ricard, dans la Nouvelle Revue (1901). Des 1899, à la Société Nationale, entre tant de peintres espagnols, accourus de tous les points de la péninsule, le groupe de Barcelone comptait seize toiles et neuf peintres : Anglada, si remar-qué cette année dans ses Quadrilles; Baixeras, L. Sarrau, Juan Brull, Ricardo Canais, l’ami peu indulgent des Cigarières; R. Casas, le lumi• nariste élégant du Bain; Masrieras-Rosès, Jean Sala, Modesto Texidor y Torres, qui s’accentuait peintre et féministe en une robuste Étude. Et je néglige les absents : Nonell-Monturiol, Rusinol, Feliu; je laisse à l’écart le graveur et lithographe en couleurs Joachim Sunyer, qui transporte à Montmartre les notations aiguës de Barcelone. Sans parler de la dernière Exposition Uni-verselle, le Salon de 5901 a confirmé celui de 1899. Encore un nouveau venu: Ricardo Planells! C’est un groupe, décidément; presque une école. Entre tous, aux vitrines indépendantes en-core mieux qu’aux Salons, Nonell-Monturiol et Ricardo Canais avaient frappé nos yeux par de hardies excursions au pays des Crétins ou dans les repaires violents des Gitanes: dessins rehaussés, précis fougueusement, comme des eaux-fortes en couleurs ! Ces partenaires fa-rouches n’étaient point les seuls. Avec les mêmes pro-cédés, tout espagnols, avec une note personnelle dans le concert catalan, un autre ar-tiste barcelonais s’est ren-contré. S’il est encore peu connu, moins connu que ses deux compatriotes, c’est qu’il n’a pas encore exposé comme eux, et que mille traverses ont attristé sa vie qui n’atteint pas encore la trentaine. Mais, l’an dernier déjà, du se’ au 15 février igoo, l’éditeur-artiste qui a tant fait pour les vaillances les plus récentes, pourvu qu’elles soient saines, avait accroché plusieurs de ses pastels dans son modeste magasin de la rue Laffitte : dès cette exposition particu-lière chez Hessèle, nous avions retenu le nom de l’artiste. Il s’appelle Ramon Pichot. Depuis, le pastelliste n’a — pas craint de se montrer plus violent. Alors que tant d’autres RAMON PIGHOT (Exposé Hess (c) LES GITANES, 1(ASTIT. FIND ART DOC