elle GEORGES LEMMEN -44% eorges Lemmen fut l’un des premiers ouvriers de l’art dé-coratif moderne sur le Con-tinent. Il avait débuté dans la peinture par le portrait, des vues d’intérieurs et des études de nu. Aussitôt que se dessinèrent en Belgique les tendances à réformer l’art dans l’objet, nées de l’influence de l’école de Morris, il se joignit aux groupes d’artistes qui représentaient ces tendances: l’sEssors, les «XX», puis la «Libre Esthétique», et apporta à leurs expositions des tapis, des broderies, des faiences, des mosaïques de verre, des couvertures de livres et divers autres travaux. M. Lemmen s’est toujours renfermé à peu près exclusivement dans la décoration des sur-faces; comme travaux en modelé, l’on n’a guère de lui que quelques objets de serrurerie en bronze, desquels on peut du reste présumer que ses habitudes de dessin pourraient être appliquées également bien à ce genre de travaux. Mais soit tempérament, soit volonté arrêtée —probablement plutôt le second, — il a préféré se spécialiser. En somme, à cette heure, ses productions se rapportent en grande majorité au dessin des tapis, des étoffes et des papiers peints, et à l’ornement du livre et de l’imprimé. Le caractère des productions de M. Lemmen a été défini à peu près dans ces termes par un critique d’art belge, M. O. G. Destrée: «Les qualités qu’on remarque dans les portraits de M. Lemmen sont aussi celles qui distinguent ses travaux d’art appliqué. Que demande le portrait, pour se différencier des autres genres en peinture? Beaucoup de conscience, une exactitude scrupuleuse, la sûreté du dessin, une science exacte de l’harmonie des couleurs. M. Lemmen a tout celà. Il met le même soin et le même amour à traiter le moindre détail qu’à concevoir l’ensemble. Ce qui frappe tout d’abord dans ses oeuvres décoratives, c’est la fermeté et L’ART DÉCORATIF. No. 12. la sûreté du dessin. Il n’est pas de ceux dont le crayon se promène à l’aventure; rien n’est laissé au hasard ; il sait d’avance ce qu’il veut, et y arrive haut la main . . .» Il faut ajouter, pour compléter ces lignes, que M. Lemmen est toujours guidé dans ses oeuvres par des convictions raisonnées. Ces convictions out été exposées par lui- même dans un article de revue. «La rénovation des arts décoratifs— écrivait M. Lemmen — que suscita, en Angleterre, le mouvement préraphaélite et qui, dans ces dernières années et spécialemeut en Belgique, a pris une si large extension, a bouleversé l’esprit du public et lui a donné une orien-tation toute nouvelle. «Auparavant l’homme de goût, l’amateur le plus éclairé, collectionnait des antiquités ou possédait une galerie de tableaux; et l’on tenait à honneur de faire ressembler sa maison à un magasin de bric-à-brac ou à la succursale d’un musée. Mais depuis que certains artistes, remontant aux saines tra-ditions des époques d’art disparues, songèrent à doter de beauté nos objets familiers, embellir le décor de notre vie, à faire oeuvre d’art, en un mot, hors du domaine étroit de la peinture et de la sculpture, — l’homme de goût d’aujourd’hui a d’autres postulations. S’il dédaigne un peu les bahuts Louis XIII et les tableaux de Meissonnier, il méprise également le mobilier bourgeois qui date de Louis-Philippe, il trouve hideux le papier à ramages de son salon et s’aperçoit que tout ce qu’il possède, depuis sa maison elle-même jusqu’à son service de table en faux Rouen, est d’une banalité désolante, d’un incontes-table mauvais goût ! «Aussi se propose-t-il de changer tout cela. Il aura une habitation commode et vaste, bien éclairée par de larges baies. Son mo-bilier lui viendra d’un ebéniste en renom, 229 29 FIND ART DOC