L’ART DÉCORATIF combien la conception anglaise du îdiomez tend davantage vers elle que celle de nos pays, il prit pour tâche de convertir ses compatriotes à ses idées, et se mit à dessiner des meubles qui se rapprochaient d’abord beaucoup du genre anglais — il n’en pouvait être -autrement, —puis prirent bientôt un caractère à eux. Il trouva dés adeptes, c’est à dire des acheteurs, et, groupant quelques artistes de talent, MM. Rassenfosse, Donay, 13erchmans, fit de sa ville natale un petit centre d’art. Puis, comme l’homme d’initiative et l’artiste étaient doublés chez M. Serrurier d’un habile industriel, il ne tarda pas à entraîner après lui tout ce que la Belgique compte d’esprits indépendants — c’est à dire beaucoup. Sans être le produit d’une création puissante ni – même toujours d’une irréprochable pureté de formes, ses intérieurs plurent, parcequ’ils sont l’oeuvre d’un honnie qui voit juste, et que tout en eux est avant tout sain. Depuis, M. Serrurier s’est vu disputer le terrain par d’autres artistes qui, venus après lui, ont apporté des qualités d’imagination qu’il ne possède pas au même degré, mais non la belle pondération d’esprit qui le caractérise. Il semble — à juger par le spécimen de ses pro-ductions actuelles exposé cette année au Salon qu’il aie quelque peu subi leur influence. Comme la voie dans laquelle il marchait en était une bonne, il faut souhaiter pour M. Serrurier que cette influence n’aille pas jusqu’à l’en faire changer. M. Serrurier se prépare, nous dit-on, à tra-vailler aussi pour Paris. Paris n’y perdra rien, et les intérieurs de l’altiste ne pourront qu’y gagner; dans l’adaptation aux habitudes fran-çaises, ils acquerront ce qui leur manque jus-qu’ici en grâce et légèreté. x. Au sujet des travaux en cuivre repoussé de M. Berlepsch-Valandas et de ceux en fer forgé de M. Petrasch, on reconnaîtra que si, dans ces travaux, les formes peuvent ne pas répondre de tous points au goût français, c’est du moins là de véritable art industriel, de l’art dans l’objet usuel compris comme il doit l’être. Il est pénible de constater la stérilité de la France dans cette sorte de productions, en regard de l’activité qu’y déploie l’Allemagne. Dans ces industries du cuivre et du fer forgé, oh rien qu’un peu de goût dans les formes suffirait à créer une foule de jolis objets usuels, nous ne faisons rien, absolument rien ; pas une seule tentative n’est à notre connaissance. Est-ce qu’il ne se trouvera pas quelqu’un chez nous aussi pour dessiner quelques jar-dinières faites d’un pot de cuivre tout simple, niais d’un bon profil, et de trois pieds en fer noirci, auxquels on ne demande que d’être élégamment pliés et sectionnés, sans la sempi-ternelle volute à tous les bouts ni les ridicules fleurs embouties? Ce serait à désespérer. Il n’y a pourtant pas besoin de s’appeler Rodin pour trouver celà! a. Nous avons eu déjà l’occasion de reproduire une tenture de M. P. Ranson; nous donnons aujourd’hui d’autres travaux de lui. L’ensemble des oeuvres décoratives de M. Ranson montre un artiste à la recherche d’une formule per-sonnelle qui ne se dessine pas avec une netteté parfaite jusqu’ici; il reste de l’indécision dans la plupart de ses dessins, surtout dans ceux oh l’ornement joue un rôle important. M. Ranson a du moins le mérite de n’imiter personne. Quand tant d’autres trouvent commode de ne penser que par autrui, c’est beaucoup de s’efforcer de penser par soi-même. a. Quelques gracieux étains exposés au Salon par M. Louis Boucher annoncent une jeune artiste doué d’un sentiment délicat de la forme. Nous en reproduisons deux. 1. 19?