L’ART DÉCORATIF MFDIZ-PEl…, FSI1F N° X L’ART DANS TOUT n empruntant ce titre à la compagnie d’excellents ar-tistes qui l’a fait sien, je la prie d’abord de m’excuser. Il est trop gros de points d’interrogation, ce titre, pour que le journaliste, avide de sujets de copie et pillard de sa nature, ne s’en empare point tôt ou tard: je prends les devants. Que faut-il entendre par ces mots, l’art dans tout? Je ne crois pas que MM. Félix Aubert, Char-pentier, Dampt, Plumet, Tony Selmersheim et leurs amis se soient mis d’accord sur leur sens avant de les inscrire en tête des catalogues de leurs expositions. Car il est clair que M. Dampt entend par l’art dans un meuble tout autre chose que MM. Plumet et Selmersheim, pour ne prendre qu’un exemple. Pour M. Dampt, sculpteur, c’est l’orner de figurations sculp-turales; bonnes cela va sans dire; non jetées au hasard, mais ingénieusement rattachées au princi-pal, et faisant naître l’idée de quelque rapport délicat entre elles et la fonction du meuble. Pour M. Plumet, architecte, mettre l’art dans le meuble, ce n’est rien de plus qu’en affiner harmonieusement les formes géométriques et les proportions, sans y rien introduire d’étranger. Voilà deux définitions très-différentes! Même sans préjuger si toutes deux sont bonnes ou si JUILLET 1899 la vérité de l’une entraine la fausseté de l’autre, nous sommes en présence de deux arts qui n’ont rien de commun. Lequel faut-il mettre dans tout? Mais voici mieux. Si M. Majorelle était consulté sur le cas, pas de doute qu’il réponde que sa recette, à lui, pour faire entrer l’art dans le meuble comprend l’indispensable condition d’en décorer les panneaux de marqueterie, c’est-à-dire de peinture. Celâ fait un troisième art. On serait embarrassé à moins. Appelés à défendre leurs manières d’entendre l’art dans l’objet — qui ne diffèrent que par ce que l’un demande à la peinture ce que l’autre fait avec la sculpture — M. Dampt et M. Majorelle auraient pour eux un argument puissant. Depuis l’aurore de l’humanité, l’homme s’est appliqué à orner les objets dont il se sert de dessins sculptés où peints, et ces dessins ont de tout temps essayé de rappeler la nature : les figures, les animaux, les plantes, les fleurs. Grossière chez les premiers sauvages, cette décoration s’est perfectionnée, son caractère a changé avec les civilisations et les peuples, la fantaisie des artistes l’a paré de titille ressources; mais le principe est toujours resté, et même à l’heure qu’il est, il semble immuable à la plu-part de nous, tant il est vieux. Le malheur est que cet argument soit une arme à deux fins. Comme le sabre de M. Prud-homme, la raison d’ ancienneté sert à défendre les institutions, et au besoin à les combattre. Je ne rappellerai pas toutes celles qui, aussi vieilles que le monde, semblaient devoir durer L’ART DÉCORATIF. No. 10. 14 I 13