LA RENAIssAN( E DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES LUXE Charles Jacque, Gigoux, un peu plus tard Henri Monnier, Daumier et Ga-varni. Il dessinait déjà au temps où les graveurs sur bois anglais faisaient chez nous le principal de la besogne. Ses Évangiles, pa-rus en 1838, sont gravés par Orvrin Smith, Sears, Thomas Williams, etc. On a de lui un Quentin Dur-yard, et un album à texte, Types el caractères an-ciens, où la lithographie en couleur côtoie la vi-gnette gravée en bois. Chose remarquable, il n’y a presque pas de style Louis XV dans tout ceci. L’illustration cependant fut une des avenues offer-tes au style pompadour, à cause des ouvrages du xvi lie siècle qu’on publiait avec figures : Vicaire de Wakefield, par exemple, Voyage sentimental, que Charles Jacque a décorés de charmants habits à la française et de jolies robes à paniers. Théophile Fra-gonard n’eut pas cette fortune-là. Dans les Évangiles, on le voit, au contraire, aux prises avec l’ornement roman. Mais il avait une souplesse admirable : en sorte qu’il n’y a rien de mieux venu que ses pré-parations au crayon pour ce livre; Singulier spectacle, que de voir un artiste de cette école se débrouiller aussi lestement dans la Bible de Charles le Chauve, l’Évangéliaire de Lothaire, le Livre de chasse de Gas-ton Phébus, où son crayon fin et rapide va butiner vignettes, encadre-ments, culs-de-lampe. Théophile Fragonard entra au ser-vice de la manufacture de Sèvres, en 1847. Il y aura lieu, je pense, de publier un jour ce qu’on trouve dans ses carnets de ses idées là-dessus. Il est certain qu’il fut le premier à supprimer les fonds de couleur en r; à l/ l.’ tel+, aga‘, • •v. RES. En haut : THÉOPHILE FRAGONARD. D•CORATION D’UN VASE. AQUARELLE. En bas : THÉOPHILE FRAGONARD. PORTRAIT DE L’AUTEUR. 509 usage dans cette manu-facture depuis le premier Empire, qui en faisaient ressembler les produc-tions, comme il dit, à de la tôle vernie s. Le pre-mier il donna pour fond à ses sujets le ton naturel de la porcelaine. Pour cela, les figures emprun-tées à Watteau, à Bou-cher, à son aïeul, parais-saient tout appropriées. Il les imita, ou, pour mieux dire, il s’en nourrit, s’en imprégna, au point de les rendre avec toute la facilité, tout l’élan d’une production originale. Les figures du xviiie siè-cle sont littéralement entre ses mains ce qu’était l’ornement pompéien chez les artistes du temps de Louis XVI. On ne saurait voir de plus complet pil-lage, donnant naissance à des ouvrages exécutés avec plus de naturel, et conséquemment plus agréables. Il ne faut pas compter les trouver à Sèvres, qui ne garde pas d’échantillons i; mais ils revivent dans quantité de modèles et d’études qu’il a laissés. Le plaisir que donnent ces inventions reçoit un singulier appoint de son talent pour l’aquarelle. Il n’en est pas de plus charmante. Tantôt c’est un tracé à la plume, que des couleurs vives viennent laver : tantôt, sur le lavis achevé, il reprend à la mine de plomb le sujet et jette partout des traits de force. A côté de la grande composition, il aime à jeter un léger croquis qui en résume l’effet, et qui en est comme l’extrait pittoresque, tantôt soutenu de quelque coloris, tantôt en blanc et noir seulement. Tel que le mon-trent ces menus ouvrages, Théophile Fragonard se classe comme un des artistes les plus habiles du siècle. FIND ART DOC