486 LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE nant avec le marbre, et par une ornementation de bronze ou autres métaux, ciselés et dorés, venant s’appliquer sur le marbre ou s’y encastrer. Ces modes de décoration, dont l’Italie avait conservé la tradition, venaient en droite ligne de l’Antiquité et nous les retrouvons dans la description que Pline le Jeune nous a laissée de sa maison de Toscane : L’appartement est revêtu de marbre jusqu’à la hauteur d’appui ; le reste des murs est orné de peintures, qui ne le cèdent point à la beauté des lambris ; ce sont des feuillages, au milieu desquels se jouent des oiseaux de toutes couleurs. » Le travail du marbre était arrivé chez les Romains à une grande perfection et on teignait celui-ci en couleurs variées, notamment en pourpre. Quant aux peintures en trompe-l’oeil, des spécimens en ont subsisté par miles ruines du Forum Romain et, en maintes parties de l’Italie, l’usage s’est conservé aujourd’hui d’en orner les murs extérieurs des mai-sons. L’Antiquité avait pareillement pratiqué toutes sortes d’essais de bronzes, de patines de bronzes et d’alliages de bronze avec le cuivre, l’étain, l’or même et l’argent, pour la décora-tion des temples et des palais. C’est tout cela qui se retrouvait transplanté à Versailles. Charles Le Brun avait pris en main l’oeuvre de décoration générale. Direc-teur des Gobelins, où ne se fabriquaient pas seulement alors des tapisseries, il donne des modèles aux orfèvres, aux ébénistes, aux ciseleurs et aux mosaïstes. Comme Louis XIV unifie autour de lui le gouvernement poli-tique, Le Brun en fait autant avec l’art. Il exige que tous ceux qu’il em-ploie marchent dans son sil-lage. Quel-ques-uns de ces subalter-nes ne sont pas les pre-miers venus cependant: en peinture, les deux Coypel ; en sculpture, Warin, Nico-las Coustou, Coysevox, Gi-rardon, et tant d’autres; le serrurier De-lobel , qui forge le fer ; les frères Keller, qui fondent le bronze ; dans l’art déco-ratif proprement dit, Claude Ballin, Boulle, Pierre et Philippe Poitou, Jean Oppenord, Domenico Cucci et Phi-lippe Caffiéri. Le Brun leur impose ses conceptions per-sonnelles, mais n’écrase pas, dans l’exécution, leur mérite propre, leur interprétation d’artiste. Voici d’abord, intact et bien conservé, l’Escalier de Marbre. C’était je plus fréquenté du Château, l’entrée habituelle du Roi et de la Reine. Com-mencé par Le Vau, il fut achevé, dans le même style, par Mansart, en 1681. Ses murs sont revêtus de mar-bres blancs, rouges et verts ; la rampe est de marbre noir, veiné de blanc. Au palier du premier étage, une niche abrite un beau groupe, par Massou. ,‘ Deux Amours, écrivait Félibien, en 1685, à l’aide de leurs mains et de leurs carquois, élèvent un bouclier où les chiffres du Roi et de la Reine, entrelacés de bran-ches d’olivier sous une Couronne de France, sont envi-ronnés d’un laurier et surmontés de deux flambeaux allumés, avec une couronne de roses, qui termine le groupe. » La description est tou-jours exacte. Les pilastres sont de marbre de Dinan, avec des chapiteaux dorés. Les dessus de portes sont ornés de bas-reliefs, en alliage de plomb et d’étain doré, par Masson et Le Gros, d’une large et puissante facture, qui représentent des sphinx Ailés, aux pattes et aux flancs nerveux, aux seins durs. Enca-drée dans une arcade, une peinture en trompe-l’oeil représente une Galerie de Palais en perspective. « Outre plusieurs person-nages qui paraissent dans le lointain, dit Féli-bien, on a peint sur le devant un jeune homme, avec une cor-beille de fleurs en ses mains. » L’architecture a été peinte par Meusnier, les figures sont de Poerson, les fleurs de Blain de Fon-tenay. De l’Es-calier du Roi, qui faisait pendant au précédent, de l’autre côté de la Cour de Marbre, ri Cl.. GIKAUDOX. TABLE EN BOIS DORÉ, A PIEDS CINTRÉS, AVEC FIGURES DE BOUFFONS, DU STYLE DE DU CERCEAU. – DESSUS EN MARQUETERIE DE MARBRES. SUR LA TABLE, LA MAQUETTE DE LA STATUE DE L’HIVER DE GIRARDON. – SALLE DES GARDES DE LA REINE. *FINI] ART, DOC