n’est paS hom-me à se décon-certer pour si peu. Il a con-fiance en son étoile. 11 conti-nuera donc à apprendre, tout seul, son mé-tier. Situation rêvée pour un jeune homme qui prise par-dessus tout l’in-dépendance ! Il ne lui suf-fit pas de s’être affranchi. Il veut émanciper les autres. Par-tout où l’on s’agite, partout où il y a une revendication à soutenir, partout où l’on se bat pour une. idée, il accourt. Un grand événement littéraire, comme l’ap-parition d’Hernani, en 1830, ne pouvait pas le laisser indifférent. A l’idée qu’une cabale est montée par « les Classiques » pour faire échouer la pièce, il s’en-flamme, il bondit et, le jour de la première représen-tation, il est là, suivi d’une pittoresque légion de rapins, prêt à l’attaque, bien décidé à ne reculer devant aucune violence. A un certain moment, comme les têtes séniles du parterre s’échauffent et osent protester, il se dresse et du haut de son perchoir leur lance à pleine voix, cette phrase qui tombe comme un couperet : « A la guillotine, les Genoux ! (« était sa façon, à lui, de signifier qu’il ne transigerait pas. Ce mot terrible fit fortune, mais ceux qu’il visait le lui feront payer cher Il est reçu pour la première fois au Salon en 1833. Il y entre, pour ainsi dire, à l’improviste, avec quatre « pochades », aujourd’hui perdues, où se marque nette-ment l’orientation de son génie douloureux, âpre et tourmenté : Gilbert mourant ; Deux pauvres femmes (La Misère) ; La Mendicité (ou la Famine); le buste de G. Laviron. C’est un véritable succès pour un début. Il est déjà question de lui confier l’exécution d’un des bas-reliefs de l’Arc de l’Étoile. Par malheur, ces bonnes dis-positions ne durent pas. L’année suivante, le Jury semble pris de remords d’avoir montré tant d’indul-gence pour un artiste coupable de tant d’indocilité. Préault avait envoyé cinq oeuvres. Une seule est reçue, la Tuerie, bas-relief en bronze actuellement au Musée de Chartres. Mais, en recevant ce ntorceau, le Jury, LA ISSANCE DE L’ART FRA ET DES INDUSTRIES DE LUXE LA TU ‘I 1, t11. 11lt s. ERIL. CHARTIt 455 malicieux, pense jouer un vilain tour à l’audacieux jeune homme ; il escompte que k public s’in-dignera contre ces dangereuses nouveautés et les couvrira de ridicule, pour le plus grand bien des Bosio, des Cortot, des Ramev et des Pradier, qui re-présentaient alors la saine tradition. La Tuerie était pourtant une belle chose, dont Préault n’avait pas à rougir. Aussi reparaîtra-t-elle, pour venger l’artiste, au Salon de 185o. C’est, en une syn-thèse émouvante, qui fait songer à Donatello, l’image atroce de la guerre. Ici, une mère échevelée, folle de douleur, tenant dans ses bras son enfant mort, crie sa hainç à un guerrier impassible. Plus loin, une femme renversée, en proie à une vive frayeur, s’efforce de re-pousser un nègre lipu et grimaçant. Au premier plan, un guerrier, couvert (le blessures, affaissé, pousse des hurlements effroyables. « On n’y démêle tout d’abord, écrit fort justement Théophile Silvestre, que des mains crispées, dr, torses inégaux, montueux, escarpés, des bouches béantes, des chevelures hérissées ou flottantes comme les flammes d’un incendie poussé par le vent… L’influence du modelé des peintures (le Rubens y est partout sensible ; le dur métal y prend, en certains en-droits, la souplesse vivante de la chair… » Les quatre morceaux refusés au Salon de 1834 étaient des plâtres représentant un jeune et un vieil Empereur romain (deux médailles colossales), un Juif arménien, un groupe de Parias. Nous ignorons ce qu’est devenu ce dernier. Mais nous le connaissons par une lithographie qu’en fit Célestin Nanteuil, dans l’Artiste, pour pro-tester contre la décision du Jury. Nous y retrouvons les mêmes qualités de réalisme et de pathétique. Cependant, en s’obstinant à chercher la vérité, Préault ne faisait qu’aggraver le malentendu qui s’était créé entre lui et ceux qu’on appelait déjà « les membres de l’Institut ». Ceux-ci le lui firent bien voir. Ils reje-tèrent en bloc les quatre morceaux que leur présenta FIND ART DOC