I À kl..›..■t.1Ni. 1•_ PI I MI FRANÇAIS ET DES I■ LIES DE LUNE 419 GROS POINT DE VENISE. – N leur souplesse, forment un contraste admirable avec les riches étoffes aux couleurs éclatantes. A la Révolution, la dentelle fut bannie de partout. L’art de la dentelle connut alors la décadence, mais il devait renaître un jour. Le lieu de sa renaissance est encore Venise. L’hiver de 1872 fut très rigoureux et la lagune qui environne Venise et les îles adjacentes se couvrit de glace; or, dans ce pays, au tiède soleil, la gelée est un ennemi bien cruel des choses et des gens. A Burano, où l’on ne vit que du produit de la pêche, la gelée s’accompagnait de la famine. Alors une grande dame vénitienne, la comtesse Adriana Marcello et un cavalier vénitien, Paolo Fambri, s’enten-dirent pour porter secours aux malheureux de Burano. Plutôt que de faire des aumônes, ils songèrent au rem-placement du travail qui manquait, par un autre travail, Aux xvite et xvitte siècles, Burano avait produit les dentelles les plus précieuses, mais nul, croyait-on, ne connaissait plus le secret du point de Burano. Pourtant une vieille femme en avait le sou venir ; elle avait travaillé dans sa jeu nesse le point de Burano et pouvait, pa conséquent, l’apprendre aux autres… C’est ainsi que l’école fut fondée et finit par triompher, en dépit des diffi cuités de tout ordre. Ainsi, deux âmes généreuses et ecla rées et une pauvre vieille femme ayan t bonne mémoire, aidèrent à la renais-sance merveilleuse de cet art féminin en Italie. qui donne du travail actuelle-ment à des centaines de milliers de femmes dans les campagnes et dans les villes, et qui rapporte plusieurs millions par an. Et l’on trouva partout, parmi les dames italiennes, des cœurs généreux qui se char-gèrent de faire revivre le vieux point oublié et initièrent les ouvriers à la façon de tisser et de tresser dont toute trace semblait effacée à jamais. Ce mouve-ment qui avait eu son origine dans la pauvre petite île de Burano se propagea en un demi-siècle d’un bout à l’autre de l’Italie, des Alpes à l’extré-mité de la Sicile. On fonda à Rome une Société coopérative, portant le nom d’Industries de la lemme, qui devint très florissante, en créant des ateliers et des écoles dans chaque région, de sorte que les femmes finirent par s’adonner joyeusement à ce genre de travail, traditionnel en leur pays. Et maintenant, en attendant que les artistes donnent à leur tour leur aide à ce travail de la femme, comme ils firent au temps jadis, pour créer des formes nou-velles en harmonie avec les temps nouveaux, on peut affirmer, sans crainte, qu’il n’est pas de travail de dentelle, soit à l’aiguille, soit aux fuseaux, aussi riche ou compliqué qu’il puisse paraître, que ces ouvrières ne sachent exécuter avec la même perfection et le même goût que leurs aïeules. FIGURE AU POINT EN L’AIR. ELISA RICCI. 5