r. LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE 391 JOUETS. — XVIe siÈcLa. PRESSE EN liOIS DE CYPRÈS. ROUET. — TRAVAIL RUSTIQUE DU XVI° SIÈCLE • d’autrefois ne devaient pas en contenir autant. Et, certes, les intérieurs d’Antonello, de Carpaccio et de Ghirlandaio tiennent compte de l’espace vide dans le rythme d’ensemble, beaucoup plus que cela n’a été fait dans la 4( chambre nuptiale reconstituée. Mais il faut se souvenir que le xvie siècle a beaucoup plus rempli les espaces que le xve siècle, et que de nombreux inventaires parvenus jusqu’à nous, donnant la liste des objets ren-fermés dans une seule pièce, prouvent qu’ils étaient extrêmement nombreux. La rareté des objets était en quelque sorte une manière de styliser le milieu qu’adop-taient les peintres dont nous venons de parler ; mais cela ne correspondait pas à un usage généralisé. Les milieux peints par ces grands maitres étaient une splen-dide création de leur imagination ; tandis que la chambre nuptiale de la maison Bagatti-Valsecchi correspond probablement beaucoup plus à la réalité, plus riche d’objets matériels et plus pauvre de goût artistique. Il n’est point possible ni nécessaire de donner une liste des centaines d’objets d’art décoratif réunis dans la maison Bagatti-Valsecchi. Il faut les voir, au moins reproduits. •Aussi, en présentons-nous quelques-uns, choisis parmi le plus curieux. Un damier en marqueterie avec des dames et des dés sur lequel sont posés des jouets de proportions miniscules : un carafon en métal, un bocal en faïence, un petit mortier en bronze. Il est naturellement rare de trouver des jouets du xvie siècle ! A côté d’eux on observera un rouet d’art rustique, un petit meuble à tiroirs tout en marqueterie de la même époque ; enfin, une sorte de presse en bois de cyprès gravé, qui servait pour plier ou repasser le linge et aussi pour y étendre des papiers et des parchemins. Ce qui est encore extrêmement intéressant, c’est la série des objets en fer forgé pour cheminées, plus complète que celles qui nous sont parvenues en général, et dont on se servait beaucoup autrefois dans l’Italie du Nord, si bien qu’on trouve encore des exemplaires en usage dans les campagnes du Frioul. Parmi les bijoux, on remarque, entre autres, un grand collier en or garni d’émaux de plusieurs couleurs, de perles et de pierres rouges, et terminé par un pendentif représentant un aigle couronné. Matériellement parlant, il est beaucoup moins précieux que les colliers que l’on porte aujourd’hui, mais c’est incontestablement la création d’un art très raffiné. L’intérêt, que les nombreux objets de la maison Ba-gatti-Valsecchi présentent pour les amateurs d’art de la Renaissance italienne, consiste dans ce fait qu’ils ne reflètent pas toujours le goût révélé par l’architecture, la sculpture ou même la peinture. La culture classique qui a donné une si forte impulsion à ce renouvellement du goût qui fut appelé Renaissance, n’influença pas les modestes créateurs d’objets d’un usage courant. Aussi leurs oeuvres conservèrent-elles l’empreinte de la grande tradition du moyen âge, ainsi que de cette liberté de création qui diminue chez les artistes en raison inverse de leur culture. LIONELLO VENTURI. FIND ART DOC