FIND ART DOC, LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE 257 rieur à l’autre, quoique la présentation générale con-serve une parfaite harmonie d’entente dans les lignes, dans les masses, dans la grandeur du faire et dans l’expression du sujet. Il me parait superflu de savoir si c’est à Jehan Michiel ou à Jorge de la Sonète que revient la meilleure part ; et je la place du côté de celui qui tailla les deux admirables figures que nous repro-duisons ici (z). C’est au même auteur qu’il faut donner ce magistral Nicodème au front veiné, émergeant d’un capuchon aux plis im-posants, et le corps du crucifié d i – vin, dont l’a-natomie sa-vante et sensible pa-rait garder dans la mort l’étonnante puissance de la vie. Ce n’est point là un cadavre mais le Verbe lait chair qui doit ressus-citer. Un dé-tail, entre d’autres, im-portants, m’ a confir-mé dans la distinction que je fais en l’oeuvre de ces deux ar-tistes inconnus ; ce sont les parties capillaires. Elles sont traitées selon l’imitation du naturel par le plus fort, et selon une recherche ornementale et un peu bizarre par l’autre. Une influence de l’antique parait même imputable à la froideur de ce dernier, et je trouve dans la figure de la Mère du Sauveur; couverte en partie de son manteau, comme un ressouvenir de Timanthe, qui, n’ayant pas osé peindre la douleur d’Agamemnon au sacrifice d’Iphigénie, voila le visage de ce père infortuné. Malgré le mystère qui plane sur cette œuvre et sur ses auteurs (car nul historien de l’art ne sait d’où ils ve-naient ni où ils allaient) ce Sainct Sépulchre demeure l’ouvrage le plus frappant que l’on rencontre en cette région, où il y en a beaucoup de fort beaux, qu’ils soient de l’école de Dijon ou de l’école de Troyes: et comme l’a dit M. André Michel, dans son Histoire de l’Art: (g En Bourgogne, le chef-d’oeuvre est à Tonnerre. »On a déploré que Jehan Michiel et Gorge de la Sonète n’aient pas laissé d’autres traces de leur magistral savoir-faire ; il se peut qu’en ce cas la critique se trompe. Le Saint Antoine du Musée Archéologique de Dijon me semble se filier a eux, et le tombeau de Philippe Pot, dont la date de 1494 est incertaine, n’est pas, avec ses étranges pleureurs, sans me faire penser aux Saintes-Femmes mystérieuses, dolentes et voilées de la chapelle funé-raire érigée par les de-LAN MI, 111,1. 1,1 it,1,.1 1’1 1-1 ,uNÊTE. —LI.n N m (s) Gràce à l’extrême obligeance de M. Prunier, administrateur de l’hôpital, qui en exécuta cette excellente photographie et documenta l’auteur de cette étude. niers de Lan-celot de B u r on fosse EMILE BERNARD -B Poursuivant mes investi-gations plus loin, aidé de M. l’Admi-nistrateur de l’hôpital, j’ai trouvé dans une vitrine deux mas-ques en plâ-tre du visage de la sainte Madeleine du u Sainct Sépulchre » ; et, par eux, il m’est clairement démontré qu’un sculpteur, qui se trou-vait en 1861 à Tonnerre. et fut chargé de restaurer l’oeu-vre de Jehan Michiel et de Jorge de la Sonète, a retouché en détruisant son expression primitivel, a figure de la Pécheresse. Il refit, sur un plan droit, les sourcils, qui étaient douloureusement levés en forme d’accent cir-conflexe, il rajouta un lobe au nez il regratta les joues, il recreusa les plis de la bouche, fit des lèvres saillantes, et durcit tous les modelés. Il est probable qu’il ne se contenta pas de traiter ainsi la face seule, et qu’il poussa sa détestable diligence jusqu’à re-gratter toute la sainte et peut être le saint Jean. Les masques qui attestent de ce massacre étant en plâtre, et pouvant disparaître un jour ou l’autre, on trouvera ici, à titre de document, la photographie de tous les deux. L’un plein d’expression, est l’original ; l’autre est la correction moderne du restaurateur. ‘ E. B. 7