LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE ’41 d’être « dignes intrare ». Donc, ne pas faire du Louvre un lieu occasionnel de rassemblement pour les curiosités oisives et les contingences exaspérées. On frémit de penser qu’à un certain moment, le legs Chauchard fut sur le point de faire entrer au Louvre, avant l’heure — une heure qui n’arrivera plus jamais—une ou deux « gloires » encore vivantes à cette époque-là, qui auraient certainement fait fuir les ombres indignées des grands morts. Le Louvre étant un lieu d’études, il ne serait pas illo-gique d’y attirer les étudiants. Il serait bon, une fois les services de la guerre liquidés et déménagés, du Pavillon de Flore qui avait été attribué au Louvre après de longues difficultés, de recréer une vraie Biblio-thèque, j’entends une bibliothèque à l’usage de tout le public studieux ; de créer une salle de conférences, avec l’outillage pour les projections, etc. Les grands, et même les petits Musées d’Amérique ont tous cette annexe indispensable. On verrait sans regret le Ministère des Finances céder une place, où il est fort mal installé, au Louvre qui en a besoin. Je ne parle pas du Musée de Marine qui est depuis longtemps condamné, mais dont le déménagement est toujours différé. Le Louvre étant le temple même du goût le plus pur, il serait excellent que les architectes qui s’y succèdent n’y déploient pas leurs aptitudes à créer des installa-tions pour nouveaux riches. Il y a certainement un juste milieu à trouver entre les prodigalités d’ornements en ronde-basse de jadis, et les trop systématiques nudi-tés et les fonds discordants des Musées germaniques. Les fonds ! Hélas ! Ce sont les fonds qui manquent le plus ! Il est certain que le vieux rouge de jadis avait fini par écoeurer. Mais il ne faut pas croire que tout fond acide, ou criard, ou intense, ou bizarre, convienne pour chaque oeuvre d’art. Jusqu’ici, les architectes ont essayé beaucoup de verts et de jaunes qui sont charmants en eux-mêmes, mais assassinent purement et simplement les peintures, les claires comme les sombrement dorées. Il est évident que le fond ocre, qui fait valoir certaines peintures ne peut en faire valoir d’autres, et qu’il est par conséquent aussi contraire à la logique qu’à l’aspect de le faire régner dans toutes les salles. Mais nous savons heureusement que cette question préoccupe vivement le Louvre. Nous sommes donc sûrs de voir enfin un jour régner l’harmonie. * Il reste bien des petites questions, qui ne peuvent pas être non plus résolues en un jour. Par exemple, celle de l’installation des meubles précieux. ‘On n’a pas encore eu le temps de les répartir parmi toutes les galeries (en les appropriant à chacune, bien entendu), au lieu de les laisser assemblées comme dans un rayon de magasin de curiosités. Il faut encore également des délais pour créer de véritables intérieurs de jadis, avec les éléments dont on dispose, comme cela s’est fait d’une manière si attrayante entre autres au Victoria and Albert de Londres. Tout cela viendra certainement en son temps. Enfin, on sait maintenant que l’École Française est grande entre toutes, et ne craint aucune rivalité dans le passé. Aussi elle a droit, au Louvre, à des arrange-ments d’honneur, au lieu des entassements de jadis. Il est certain que l’École Française était réellement disgraciée, pour ne pas dire calomniée, par les salles ou les « dépotoirs » heureusement condamnés, et qu’il faut une salle une Watteau, une salle Chardin, une salle Corot, une salle Ingres, une salle Delacroix. Il serait indigne de la France de demain de ne pas mieux traiter que naguère les gloires, véritables celles-là, de la France d’autrefois. De tout cela, nos Conservateurs se préoccupent, et nous en sommes enchantés. Nul doute, si, encore une fois, le public ne se montre pas trop pressé, que d’ici peu d’années, le plus beau Musée du monde (au rebours de la plus belle fille) ne paraisse plus donner moins qu’il a. ARSÈNE ALEXANDRE. 3 FIND ART DOC