LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE 217 MARIANO FOR DEL CA;TILLO SUR SON LIT DE MORT, (APPARTIENT A M. LE COMTE DE PMADIIRE). Femme nue (reproduite ici) n’est qu’une ébauche, mais la superbe harmonie des couleurs et la pâte savoureuse rappellent notre Manet. Mariano Fortuny (1839-1871) naquit dans la pro-vince de Barcelone, d’une famille pauvre ; son père faisait des moulages de cire pour les foires. Protégé par la députation de Catalogne, il s’en vint étudier à Madrid, puis à Rome, et il fut quelque peu académique ,,, à ce moment-là. Plus tard Gavarni, ce gavroche endiablé, l’influence et lui fait sentir que si l’Expédition des Cata-lans en Orient est une grande et respectable chose, il existe aussi de belles scènes actuelles et vivantes autour de lui, soit au Maroc, où il guerroye avec le général Prim, soit à Paris, dont il vient respirer l’ardent parfum. L’Espagne le reprend, et, chargé de toutes ces expé-riences, il peint l’Amateur d’estampes, la Fantasia, le Rémouleur, le Maréchal-Ferrant, le Jardin des Poètes, et le fameux Mariage espagnol, que nous avons entrevu à la vente de la marquise Landolfo Carcano et que le comte de Pradère a bien voulu prêter ici. Mais, voici qu’en regard de cette toile papillotante, pleine d’esprit et de reflets, un visage pâle, aux yeux clos, attire les regards, invinciblement. Oh ! la triste et admirable chose, et qui fait bien sentir les divers aspects d’un même génie ! c’est Mademoiselle de Castillo sur son lit de mort. Une seconde fois, le pinceau de Fortuny fut tenté par le mystère funèbre, et M. Mariait° de Madrazo, petit-neveu de l’artiste, nous a raconté comment : For-tuny cheminait dans les rues de Grenade, en compagnie de Ricardo de Madrazo, quand, sur une place, ils croi-sèrent une troupe grotesque et hurlante de masques en goguette ; à deux pas, un cortège passait lentement, la défunte ayant le visage découvert, d’après le rite ancien, et semblant regarder fixement les joyeux drilles. Le peintre, impressionné par ce contraste, rentra pré-cipitamment chez lui et ébaucha le Carnaval. Le sou-venir de Shakespeare dut le hanter à ce moment… Fortuny est mort à trente-deux ans, riche et célèbre, suffisant à peine aux commandes espagnoles fran-çaises et américaines. Sa dernière oeuvre, la Plage