90 LA RENAISSANCE DE L’ART• FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE L.. BAKST. – ÉTUDE POUR LUCCA. LES DAMES DE BONNE HUMEUR. scène du plus célèbre des ballets auxquels il ait collaboré. Les nuances des costumes de Schéhé-razade, leur amalgame dans le tournoiement frénétique oa leur succession détaillée, se présen-tent au souvenir avec une saveur que n’ont jamais laissé les miroitants pailletages, les fades ensembles de costumes auxquels nous étions habitués. * * * Bakst, ce nom c’est comme un bouquet de fusées de Ruggieri dans le ciel de Jusseaume. Il éclaire d’un reflet volcanique la Danse, sym-bolisée dans le coeur des Français par le groupe légendaire de Carpeaux, à l’Opéra. Il habille ces images de la Camargo ou de la Zambelli, — qui mêlent, sans trop de disparate, dans nos prédi-lections esthétiques Fragonard et Degas, —d’amples pantalons brodés, de casaquins où le cinabre et le cadmium se marient, de turbans fabuleux :d’où les aigrettes jaillissent, d’une escarboucle monstrueuse, comme le jet d’eau d’entre les joues gonflées du triton. Bakst a créé à la scène une nouvelle échelle des proportions. Il a grandi, enflé, exhaussé, le mime et le danseur ; il leur a donné par le volume et là couleur, une importance, une valeur nou-velles. Qu’il s’agisse de cette longue et précieuse fleur vivante, émaciée et souple, Ida Rubinstein, ou de cette légère Karsavina de l’Oiseau de Feu et du Spectre de la Rose, papillon qui effleure l’obs-tacle où il se pose ‘en !passant, Bakst a imposé aux personnages qu’il avait mission de présenter au public des apparences tout autres que celles qu’ils eussent gardées sans lui. L’inoubliable Nijm,ky du Spectre de la Rose, le pourpre andro-gyne à la couronne effeuillée ; l’ample jupe d’ar-gent pantalonnée dont il le vêtit pour ses bonds de l’esclave noir, dans Shéhérazade, ont laissé dans la mémoire des arabesques sans parenté avec aucune de celles qui les y avaient précédées. Quand il n’aurait fait que mitrailler, disperser ces semblants d’artistes et d’hommes de goût, qui ne faisaient que recopier le travail des ancê-tres, Bakst aurait bien mérité de ses contempo-rains et se fut rendu digne de ce Prix Nobel pour les Arts, qu’il remporta, pendant la Guerre même. Mais, il fallait s’attendre à ce que les fnêmes hommes, qui copiaient l’ancien avec acharnement, s’acharnassent au genre Bakst, aussitôt. Ils n’y manquèrent point et nous eûmes, — nous les avons gardés ! — dix, vingt, cent Bakst aux grands pieds, qui s’étourdirent et nous êc « FIND ART, DOC