LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE 71 inscrit sous l’année 1479, présentent autant de maî-trise et de pénétrante individualité. Le petit tryp-tique de l’Adoration des Mages et le portrait de Marie Moreel complètent les cinq branches de l’étoile lumineuse dans les salles de l’hôpital Saint-Jean : le retable de Saint Cristophe, Saint Maur et Saint Gilles, conservé au musée des hos-pices, fut exécuté en 1484 pour l’église Saint-Jacques. Avant sa période bru-geoise, Memling a donné d’autres oeuvres datées. L’une, de 1472, la Vierge auxDonateurs, est à la galerie Lichtenstein, à Vienne. L’au-tre remonte à 1462. C’est l’homme au bonnet haut de forme et aux cheveux fri-sés conservé à la National Gallery, de Londres. Un morceau de sa main, dont la trace est perdue, aurait même porté la date de 145o. C’est un portrait d’Isabelle de Portugal, femme de Philippe- le-Bon, qu’un voyageur du xvte siècle aurait admiré chez le car-dinal Grimani. A cette. date de 1450, rayonne à Bruxelles l’école de Roger van der Weyden, dont le style semble obséder si souvent Memling que tout porte à croire, comme le veut Guichardin qu’il se soit rangé un jour au nom-bre de ses disciples. On aimerait, par surcroît, à le voir accompagner Roger dans son voyage au delà des Alpes, vers cette même année 1450. Mais l’architec-ture du panneau de la châsse figurant la Réception de sainte Ursule à ROMe prouve que Memling ne con-naît pas la ville éternelle et ■110141/1l .S1U<011 OIS CHSNSE IDE SAINTE URSULE. — MASSACRE 1-.KGEs. (BRUGES. — HÔPITAL SAINT•JEAN.) MEMLINC.. PORTRAIT DE MARTIN VAN NILUWENHOVE. (BRUGES.— HÔPITAL SAiNT..11:;ANt.) même qu'il n'a jamais étu-dié de bien près les édifices antiques. Est-il besoin d'ailleurs de s'embarrasser de dates. de commentaires, de bio-graphies pour jouir de la suavité de ces figures dé vierges, des regards loin-tains de ces madones et de ces saints ? Faut-il, sur-tout, pour comprendre ces chefs - d'oeuvre, s'inquiéter du milieu, de la race, des contemporains ou des moeurs ? Plaisante réfuta-tion des théories de Taine et de la critique officielle ! Une ville cosmopolite de marchands, — la Venise du Nord, — une bourgeoisie turbulente et rebelle au joug, dépouillant la che-valerie française de ses éperons d'or, sur le champ de Courtrai, tour à tour en ligue avec les Gantois ou en guerre avec ses alliés de la veille, atteignant sous les ducs de Bourgogne à une opulence telle que les villes d'Italie seules sont capables de l'égaler, et ne craignant pas d'emprisonner dans le Cranenburg Maximilien d'Autriche, l'époux de sa dernière suzeraine. Et cette cité de splendeur monu-mentale, de faste et d'osten-tation, où une reine de France, Jeanne de Navarre, voit avec dépit des femmes aussi richement parées qu'elle-même, ce milieu de négoce et d'entreprise, d'a-gitation belliqueuse et de drames civils, aurait été le terrain fécondant qui aurait fait naître, avec un déterminisme aussi rigoureux que celui qui préside à la germination d'une semence, cette incom-parable floraison d'idéa 'FIND ART DOC