70 LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE un peu plus d’un an, sans avoir repris possession de son précieux dépôt. Enfin, le dimanche 3 novembre, un service magnifique et solennel fut célébré : la relique fut exposée pour la première fois à la vénéra-tion des foules dans la nef étoilée d’or. Réjouissons-nous , avec les fidèles, de cette cérémo-nie expiatoire. Mais comme les salles profanées de l’hô-pital Saint-Jean méritent, elles aussi, une réparation, consacrons à Memling une commémoration brève et égrenons en l’honneur de l’art mystique quelques grains du rosaire des louanges. Si le San-Graal de Bru-ges repose dans une châsse monumentale d’argent, d’é-maux et de pierreries, oeuvrée par Jean Crabbe avec la prestigieuse habi-leté, mais aussi la profu-sion d’ornements dispara-tes, des orfèvres de Nurem-berg, les Memling ont pour cadre une demeure hospita-lière du mue siècle, des eaux dormantes, un ciel nacré d’une profondeur in-finie. Tout cela forme un tout dont il n’est permis de rien détacher, car il n’est pas certain que la sensibilité émue jusqu’aux larmes du visiteur ne su-bisse pas à son insu quel-ques effluves de l’air am-biant (i). Transportées à Berlin, les précieuses pein-tures n’auraient rien perdu (t) Dans une Inde, on peut Imu (lire. Pourquoi certains milieu.. l’admiration des fervents d’art concentrée depuis des siècles, ne d. gageraient-ils pas des émanations radio-actives comme celles que Curie a mesurées dans les sources guéris-seuses ? CHASSE DE SAINTE URbULE. — ARRIVÉE A BALE. (BRUGES. — HÔPITAL SAINT-JEAN.) MEMLING. — LA VIERGE A LA POMME. (BRUGES. — HÔPITAL SAINT-JEAN.) de leur mérite, mais elles n’auraient plus bénéficié de ce voisinage unique du lac d’Amour et de la cour silen-cieuse du grand Béguinage, du paradis de Notre-Dame et du miroir d’eau du Dy-ver, des façades vétustes du quai du Rosaire et des ombrages du Quai vert. Elles auraient surtout perdu la douceur tranquille et un peu ennuyée de ces rues somnolentes, où les enfants jouent, où les vieilles den-tellières agitent leurs fu-seaux sur le pas des por-tes, singulière enluminure du moyen âge en marge de la vie moderne. La légende de Memling est romantique à souhait. Un soir de janvier 1477, par un des jours glacés qui suivirent la défaite de Nan-cy, un jeune peintre, atta-ché à la maison de Charles-le-Téméraire, venait frapper à l’hôpital Saint-Jean et y demander du repos ‘et: des soins. On lui donna tout cela, et l’année suivante, pour payer cette hospita-lité, il entreprit de peindre la châsse et les dyptiques tryptiques prestigieux. Duel dommage ! Memling est de Mayence. Duytschen Hans et Hans Memling ne font qu’un. Venu à Bruges aux approches de la quaran-taine, il s’y maria, y pro-duisit ses chefs-d’oeuvre et y mourut dans l’aisance le II août 1494. Sa plus belle page, célèbre entre toutes, est assurément la Châsse de Sainte Ursule, terminée avant le 24 octobre 1489, date où y furent déposées les reliques. Mais le dyptique de la Vierge à la pomme, daté de 1487,1e tryptique du Mariage de sainte C F1ND ART. DOC