CATHÉDRALE DE STRASBOURG. — LES VIERGES SAGES ET LES VIERGES FOLLES. LA RENAISSANCE DE L’ART ALSACIEN-LORRAIN eile) S »:2 IL ne suffit pas d’avoir reconquis l’Alsace ; il faut encore savoir cultiver ses magnifiques ressources. Ce n’est pas des ressources industrielles, agricoles. commerciales que je veux parler ici. Pour cela il n’y a qu’à laisser faire les Alsaciens délivrés d’une oppression qui a pesé plus lourdement que j amais pendant les quatre années de guerre. Leurs mines de potasse, leurs champs, leurs usines, tout cela est prêt à reflorir avec la collaboration de la France. Mais c’est sur la pensée et sur l’art qu’une récente tournée d’inspection m’a permis de rapporter quelques indications .que je crois intéressant de communiquer aux lecteurs de la Renaissance de l’Art français. Des musées eux-mêmes, je ne vous donnerai pas de longues nouvelles. Sauf Colmar qui a été copieusement dévalisé de ses Grunewald et de ses Schoengauer, — mais ils rentre-ront au bercail tout comme les La Tour à Saint-Quentin, — les autres sont intacts. Ce qu’il importera, c’est de mettre à leur tête des conservateurs alsaciens jeunes, actifs et instruits. Eux seuls peuvent faire mieux que ne faisaient les Allemands. Cette jeune et belle génération ne manque pas; il ne s’agira que de faire de bons choix, et pour cela prendre le mot d’ordre en Alsace même, et non à Paris, qui a toujours des idées préconçues, mais pas toujours des idées exactes. La question du mouvement artistique. Elle est beau-coup plus vaste et plus complexe. Il dépend de nous d’établir entre nos chères provinces et nous un système de relations d’où peut sortir une floraison glorieuse, — ou bien d’entraver l’expansion et de rendre les meilleures intentions stériles. Loin de vouloir leur apprendre ce qu’ils savent, il s’agit de laisser aux Alsaciens-Lorrains toute l’initia-tive dont ils se sont prouvés capables. Ne leur imposons pas des leçons dont ils n’ont point besoin, mais échan-geons des vues, prodiguons les encouragements, recueillons les fruits qui ne demandent qu’à abonder. Il va sans dire que, tout en nous gardant de la maladresse de jouer un rôle directeur, tout ce qui touche à l’art alsacien devra être l’objet de notre profonde attention. Prenons des exemples. Mulhouse doit demeurer le centre par excellence des tissus imprimés. La race fournit en nombre suffisant de charmants décorateurs, précis et capricieux à la fois. Dans les campagnes sont demeurés de vieux maîtres-ébénistes qui pourront encore former de jeunes et habiles élèves. On n’a pas idée du bon vouloir, de l’intelligence que manifestèrent, en pleine guerre, sur le petit coin de terre délivrée, autour de Thann, les enfants des écoles. Deux soldats, ardents et artistes, les frères Pimienta, le sculpteur et l’avocat, avaient en peu de temps constaté et développé chez eux le sens de l’écri-ture et du dessin. Des brodeuses de dix ans, des ébé-nistes de quinze donnaient déjà des gages de disposi-tions, et même de talents remarquables. Mulhouse, grâce à sa puissante Société industrielle, qui loin de se limiter à son titre, est un foyer de con-naissances en tous genres, stimulerait et aiderait l’art dans toutes ses applications. Le musée des tissus impri-més est, en son genre, pour l’Alsace, ce que le musée des tissus de soie est pour la région lyonnaise. Dans le palais des Beaux-Arts proprement dits, qui contient les collec-tions de peinture moderne et ancienne, et le musée histo-rique, un grand industriel qui pendant de longues années a travaillé, à travers mille dangers et épreuves, pour la pensée française, M. Auguste Haensler à réussi à fonder un des plus beaux et des plus complets musées d’art décoratif, a