30 LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE FLACON DE R. LALIQUE. MODÈLE DE LA PARFUMERIE ROGER ET GALLET. la porte intérieure en fer forgé s’embellissent de deux bas-reliefs en verre moulé, qui mettent comme une barrière entre le maître et les importuns par les gestes symboliques d’hommes nus cherchant à forcer la ser-rure de ce sanctuaire du travail. Mais si son amour pour les belles matières, si son désir de se renouveler sans cesse l’ont con-duit à des recher-ches intéressantes et ont abouti à 1,. venue au monde d. quelques beaux ob-jets d’exposition, il n’a pas encore pensa à industrialiser se, rêves. Il s’y décide pourtant, et c’est en vérité un enseigne ment et un exemple alors que la presqu. unanimité de f0′ artistes décorateur, se refuse à donner de la beauté aux objets d’usage, de voir un maître comme Lalique, le seul avec Rodin, à qui les critiques d’outre-Rhin daignent reconnaître le don d’une vision nouvelle des formes, multiplier par la fabrication industrielle ses plus pures créations, sans leur rien enlever en originalité, en élégance, en fini. Voyez-les, ces flacons séduisants, chez les grands parfumeurs, qui presque tous, aujourd’hui, veulent avoir des modèles signés Lalique, ou plutôt tentez de vous les faire montrer par le maître lui-même, dans ce lumineux atelier du Cours-la-Reine, sobrement décoré de motifs où toutes les espèces de pins, depuis l’épicéa jusqu’au pin silvestre, donnent leur note, où l’amour de la somptuosité se manifeste par d’admirables lustres en bronze et verre coulé — serpents et caméléons — sus-pendus par de grosses chaînes en fer forgé. Rien de plus simple que ces flacons. C’est le verre tout pur, transpa-rent comme le cristal et presque sans ornements. Leur décor vient du modelage et du contraste des champs lisses et des surfabes dégradées. Si la couleur intervient, c’est en tons délavés, mauve, bleu mourant, vieux vert, bistre tirant sur l’ivoire, patines atténuées plutôt que colorations véritables, faites à ravir pour s’harmoniser avec l’ambre, la topaze, l’émeraude des aromates. Ces touches, cependant, sont l’oeuvre du feu. Elles sub-sistent en touches ineffaçables. Quant aux formes, leur variété -tient du prodige. Flacons plats, cylindriques, ronds, cubiques, ovales, en étrier, aucun de ces verres ne rappelle des lignes connues, rare mérite si l’on songe combien les dessins sont restés immuables dans le bouteillage à travers les siècles! Ils ne doivent rien non plus à l’antiquité ni à l’Extrême-Orient : ils sont sortis tout construits du cerveau de l’artiste. Cependant, l’imprévu des formes FLACONS DE R. LALIQUE. – MODÈLES DE LA PARFUMERIE ROGER ET GALLET.