6 LA RENAISSANCE DE L’ART FRANÇAIS ET DES INDUSTRIES DE LUXE royal. Seuls, les noms des auteurs, l’imagier et le peintre, demeurent mystérieux. Peut-être un F. de Mély les déchiffrera-t-il un jour dans quelque coin invisible à force d’être visible ; mais, jusqu’à présent, nous en sommes réduits à des conjectures, à des vraisemblances, à des impressions. Récapitulons, cependant, dépouillé des détails d’éru-rial , plein de noblesse, de dignité et de force calme. La situation que Michel de Chaugy avait acquise à la Cour de Bourgogne était considérable. En grande faveur auprès de Philippe-le-Bon, il avait accompagné celui-ci dans les Flandres, où il avait pu rencontrer Rogier van der Weyden, à moins que celui-ci n’ait été en rapports avec lui lors de son séjour à Dijon, de 1440 à 1447. Tous deux étaient officiers et valets de chambre attachés à la per-sonne du duc. Nous venons d’en dire assez pour que l’hypothèse, jusqu’ici la plus plausible, soit présente à l’esprit, quant à l’auteur de la partie picturale. Quoiqu’il en soit, par testament de 1476, Michel de Chaugy donne une « table d’autel pour mettre sur le grand-autel d’icelle église dudict•Ambierle, laquelle table est à Beaune, en l’hostel de Laurent Jaquelin» avec « la représentation de feu mon sieur et père… laquelle représentation est de louton ». Ce que cette statue de louton », c’est-à-dire de laiton, ou de bronze, est devenue, on ne peut que trop le présumer, étant donné le sort fréquent de ce métal, même quand il est la matière d’un chef-d’oeuvre, mais la « table » fut transportée à Ambierle en 1480, et elle ne l’a plus quitté depuis. Trois compartiments inégaux repré-sentant en ronde bosse les scènes de la Passion et les beaux portraits reproduits ici forment le principal de l’ouvrage. Il mesure , dans son ensemble , 2 m . 8o de large (5 m . 6o quand les volets sont ouverts) et 2 m. 40 de hauteur. Les scènes de la Passion sont modelées avec un mélange de pathétique et de rude humour plein de saveur, et nullement dépourvu de savoir. Au contraire, il se constate, malgré l’apparente gau-cherie, une véritable entente de la com-position dans ses scènes du Baiser de Judas, du Christ outragé, du Christ à la colonne, du superbe Calvaire central (les corps de la Vierge et de Madeleine sont d’une belle souplesse) puis, de la Descente de Croix, de la Mise au tombeau et de la Pésurrection. Michel de Chaugy, dans la partie picturale, est accom-pagné de son patron saint Michel. On ne pourra oublier, l’ayant une fois vue, cette charmante et chevaleresque figure de l’archange, avec sa cotte de velours cramoisi sous sa cuirasse, son grand manteau brodé d’or à grands ramages bleu sombre, ses ailes diaprées, et qui dédaigne de s’apercevoir de la présence du pauvre démon t qui se cramponne si comiquement à ses jambes GUILLEMETTE DE MONTAGU. (DATAI!. DU RETAID.E.) clittil—pure et d’histoire trop locale, ce que nous savons de$ personnages et mettons en lumière la beauté qui nous suffit, à la rigueur, sans que nous puissions dire à qui nous en devons le bienfait. Les sires de Chaugy avaient leurs principales posses-sions dans le voisinage même d’Ambierle. Jean de Chaugy épousa, en 1396, damoiselle Guillemette de Montagu. Fixé alors en Bourgogne, il devint le chef de la branche aînée des Chaugy-Roussillon, seigneurs de Chissey. C’est son portrait et celui de damoiselle Guillemette qui accompagne ceux de leur fils, donateur du triptyque et de Laurette de Jaucourt, sa femme, quatuor seigneu-FIND ART, DOC