L’AMOUR DE L’ART DESSIN. (illuJée du Luxembourg). de moeurs et de caractères, qui choisit ses modèles parmi les petites gens ou les gens ‘médiocres ; et, dlautre part, un imaginatif et un rêveur. L’un aurait pu être l’illustrateur consciencieux et soumis des Mémoiree jan jeune homme rangé de Tristan Bernard ; l’autre a été l’illustrateur de Molière, de Couperin et d’Henri de Régnier. Ainsi voisinent, dans une riche production, les platitudes de l’existence quotidienne et ce qui permet de s’évader de cette existence-là. Du même trait calme, épais et lent, Maxime Detho-mas fixait tour à tour sur le papier l’aspect morose de tel petit bourgeois des Ternes, de telle pauvre fille de Montmiirtre, et la silhouette (parée de la poésie que le temps confère à ce qui n’est plus) de tel personnage du carnaval vénitien, de tels fantômes à perruque ou à vertugadin des Amante illagnifiquee et de la Cité dee Eaux. Pour s’exprimer, Maxime Dethomas avait mis au point un métier dont l’originalité n’a peut-être pas été suffisamment discernée par ses contemporains. Ces grands dessins sombres et massifs, où les noirs l’em-portent le plus souvent sur les blancs, très construits, et, pour ainsi dire, « architecturés », à les apercevoir, sans se soucier de ce qu’ils représentent, de qui pourrait-on les rapprocher ? Il me semble qu’il faut remonter jusqu’à Piranèse pour trouver un artiste qui, autant que Dethomas, a aimé étendre et étaler sur la blancheur du papier les noirs de l’encre ou du charbon. Comme Piranèse avec le burin et le cuivre, Dethomas impose aux yeux, avec le fusain et le crayon Conté, le poids et l’épaisseur de la matière. Il enferme pour ainsi dire ses personnages dans leurs propres contours ; l’être humain devient dans cette oeuvre le prisonnier de ses formes. La plupart des figures qu’il traça ont une densité presque opprimante. Les pas de ces per-sonnages, s’ils s’animaient devant nous, n’auraient-ils point la sonorité volumineuse et implacable de ceux que Mozart fait entendre, lorsque, au dernier acte de Don Giovanni, le Commandeur, chaussé de bottes de basalte, avance autoritairement dans la nuit ? *** Le souci de Maxime Dethomas ne semble jamais avoir été de donner, par le dessin, l’impression ou l’illusion de la vie. Le frémissement de l’épiderme, l’immatérialité d’une chevelure, les indécisions de contours dont la lumière spiritualise les formes, ne l’ont jamais tourmenté. A cet égard, si son grand ami de jeunesse, Toulouse-Lautrec, l’a influencé quant aux choix des sujets, cette influence est demeurée nulle quant à la manière dont ces sujets sont traités. Toulouse-Lautrec essayait de fixer ce qui fuit, ce qui s’efface, ce qui ne se laisse qu’éphémèrement apercevoir. Une litho de Lautrec est un instantané. Pour lui, une femme qui passe est aussi prête à se dérober, à disparaître, que le papillon, que la fleur, le rayon sur l’eau. Dethomas, au contraire, cherche à dégager plastiquement d’un être ses éléments de durée. Les diverses parties qui composent un individu, il les soumet à un tout inamo-vible. Un gant, un bouquet, une feuille de papier DESSIN. FIND ART, DOC