L’AMOUR DE L’ART 79 JEAN ALAZARD. Pérugin. (Les (;rands Artistes, chez Laurens). M. Alazard a eu bien du courage. Il a entrepris de nous intéresser à un artiste peu intéressant, et il se tire de cette tâche ardue avec beaucoup d’érudition, de finesse, et de Pénétration. Que Pérugin ait été dévôt ou non, le fait est qu’il ennuie, Parce qu’on le sent dépourvu de toute pas-sion religieuse ou esthétique. C’est un fabricant, un fabri-cant que son travail ennuie, et qui ne fait jamais un effort Pour se perfectionner. Qu’on le compare, je ne dirai pas seulement à un Signorelli, à un Pierro della Francesca, mais même à ce délicieux narrateur qu’est Benozzo Goz-zoli, à ce bavard amusant qu’est Pinturrichio, et l’on constate à quel Point il se répète, à quel point il manque d’accent. Que reste-t-il donc au compte de Pérugin Quelques portraits d’un réalisme sobre, la place qu’il occupe comme maître de Raphaël ; enfin le fait qu’il a su tirer de la Peinture à l’huile des effets, qui Pour l’époque étaient neufs, et dont les conséquences furent grandes 11. Alazard nous expose tout cela sans exagérer les méri-tes de l’artiste. Souhaitons de le voir bientôt s’attaquer à un sujet où ses qualités de critique pourront mieux s’employer. LION DORDORe. FEDERICO HERMANIN. Assise, la ville de Saint François i vol. illustré. 186 p. Editions Nilsson, Paris 1927. Les Editions Nilsson ont entrepris la Publication d’une collection nouvelle : « Les trésors d’Italie n, que dirige H. Federico Hermanin. Celui-ci vient d’en écrire le Pre-mier volume, consacré à Assise, volume qui se divise en deux parties à peu Près égales, la première racontant l’histoire de la vie de Saint François, la seconde étudiant la construction et la décoration de la basilique merveil-leuse. M. Hermanin qui est au courant des travaux les Plus récents sur ce temple que l’on a tant étudié, adopte les conclusions de la thèse récemment exposée Par M. Su-Pino, professeur à l’Université de Bologne. Celui-ci a dé-montré, Par un examen minutieux de l’église supérieure; que .celle-ci avait subi des remaniements profonds ; frère Elie de Cortone, premier architecte des Fransciscains l’avait construite à Peu Près en II I (1 me temps que l’église inférieure ; c’est à la suite de l’Innocent IV à Assise, en 1253, que furent entrepris les travaux destinés à modifier entièrement l’aspect de la basilique supérieure. M. Hermanin étudie ensuite les fresques de Cimabue, des peintres romains, de Giotti et des Siennois, donnant une description Précise des principales d’entre elles. La grande basilique seule retient son attention ; les autres monuments sont rapidement mentionnés ; c’est à Saint François et au Temple oit vit son, souvenir qu’est exclusi-vement consacré ce volume, d’une présentation claire et d’une information Précise. J. A. G. GEFFROY. Sisley (G. Crès et Cie). Ces pages posthumes de Geffroy, parues dans l’excel-lente collection que dirige M. Georges Besson, n’appor-tent rien de nouveau sur Sisley. L’intérêt du livre est dans la réunion, réalisée Pour la- Première fois, d’un grand nombre de reproductions. Que sait-on de Sisley ? à peu Près rien, et c’est dommage car, pour être un artiste de second ordre, il n’est pas moins curieux. On soupçonne, à quelques indices, que son apport ne fut pas négligeable dans l’invention de l’impressionnisme : voyez, par exem-ple, son tableau du. Petit Palais, qui Porte la date précoce de 186s. N’aurait-il pas, ensuite, été le Premier à peindre systématiquement une « série n, bien avant les Meules de Monet, à Marly ? — Sensible, intellectuel, raisonnant son art, cultivé, peintre tantôt vigoureux jusqu’à la brutalité, tantôt d’une extrême délicatesse, on entre-voit un petit maitre attachant, qui, déshérité dans lu tombe, comme il l’avait été dans la vie Par la Fortune, attend son historien. Voilà un commencement de justice. Ces images suggestives dans leur variété, rendent Plus vif le désir d’en savoir davantage. RAYMOND KGAMEY. HENRI CLOUZOT. — Histoire ■ mi facture de Jony de la Toile imprimée en• France. 2 col. in-4°, un de texte et un de planches (Van OEst, éditeur). M. Clouzot a enfin donné l’ouvrage que l’on, attendait de lui sur un sujet qui le p n’occupe depuis longtemps et qu’il (Irait esquissé dis Puis. Ce travail de ring! ans aura abouti d’uni’ pari a la belle exposition organisée l’été dernier au Musée Galliera, et (l’autre part a ce livre, qui en est la commémoration durable. L’histoire de la Manufacture de Joui’ y est ,qubliv avec autant de rigueur que d’élégance et de sens tuefiniuue. Mais lu grande nou-veauté, pour ceux qui ont suivi les ouvrages précédents de l’auteur, est une enquête sur les autres manufactures françaises dont les produits ont clé uénéralement confon_ dus, jusqu’ici, avec ceux de Joug. Leurs vicissitudes ne pouvaient être retracées dans le même détail, attendu qu’il y faudrait, comme base, des monographies locales qui n’ont pas encore été faites. Elles trouveront désormais un stimulant et un cadre irréprochable. Ce n’est point faire tort au mérite de .11. Clouzot — au contraire — que de signaler la présentation de l’ouvrage, qui est d’un gon, rare dans les ouvrages (l’érudition. La couverture est faite (1′,1;le toile imprimée, sur laquelle se détache un litre dessine avec un remarquable équilibre des blancs et des noirs. Le corps du texte est imprimé en beaux carac-léres co•hiu, d’une encre d’un noir profond. PIERRE DU COLOMBIER. C1:011(iES CLEMENCEAU. — Claude Monet, les Nymphéas. In volume de 124 pages, (Plon, éditeur). Un petit livre curieux, que le l,,or (lu style rend d’une lecture parfois malaisée, plus important encore polir la comprehension de la pensée de Clemenceau que pour celle de l’art de Monet. On sait que les deux hommes furent ((rands amis, ce qui donne aux souvenirs de Clemenceau sur la personne du peintre une valeur spéciale. Mais la philosophie de l’art de celui-ci, conçu comme inconsciem-ment avec les notices scientifiques les plus récentes sur l’unirers, paraîtra discutable. Il est noble, en tout cas, de la pur, de Clemenceau, (l’avoir célébré en Monet — ce peintre pur — l’homme d’action. Cela implique le respect pour une forme d’urtirité qui échappe en général aux hommes politiques. P. C. H ■NS TIETZE et E. TIE CZE-CONRAT. — Der junge Dürer. Lu l’obi me in-4° avec 500 illustrations. (Dr Benno Fischer I crl(ty G. M. B. H., éditeur â Augsbourg). (‘el ouvrage a, dans les milieux auxquels il s’adresse, soulevé des tempêtes, dont les moins surpris n’ont pas dû être les auteurs. Quelle que fût l’opinion de ceux qui l’ont attaqué, ils auraient pu, du moins remercier M. et Mme Tietze de les avoir doté d’un instrument de travail in-comparable. C’!.7′ la plus grande partie du livre se com-pose d’un catalogue raisonné de toutes les oeuvres de Dürer (peintures, gravures, aquarelles, dessins) ou de celles qui lui ont été attribuées avec de sérieuses raisons. Chacune de ces oeuvres est reproduite à échelle assez petite, évideMment — et la notice qui l’accompagne ren-voie à la formidable bibliographie qui s’est accumulée sur Dürer. Lorsqu’on envisage d’une part ce travail de béné-dictin, et qu’on lit d’autre part le reproche que font cer-tains critiques allemands aux auteurs, d’avoir publié un ouvrage hâtif, on ne peut s’empêcher de sourire. D’où vient donc cette levée de boucliers ? ll faut con-naître l’histoire de l’exégèse diirerienne au cours de ces vingt-cinq dernières années. En même temps que l’on découvrait de plus en plus de preuves des invraisemblables falsifications dont a été l’objet l’ceuvre de Dürer dès le lendemain de sa mort (addition de monogrammes, con-fection de nouvelles oeuvres avec des motifs empruntés FIND ART DOC