PITTORESQUE BIBLIOGRAPHIE La mort de Dagnan-Bouveret a une conséquence imprévue : Georges Rouault pose sa candidature au fauteuil que le maître laisse vacant à l’Académie des Beaux-Arts. Nouvelle point si étonnante qu’on pourrait le penser, pour qui connaît bien Rouault. Le peintre des filles, des clowns et des juges est resté en effet très attaché aux traditions, et plus particulièrement à celles de l’enseignement officiel dont il est sorti, puisqu’il fut le disciple favori de Gustave Moreau. En appelant à elle ce transfuge de l’Ecole, l’Aca-démie accomplirait un acte qui lui concilierait nombre de ses adversaires. Mais voilà, il y a la peinture de Rouault… Le peintre, actuellement en Suisse, a chargé son marchand et ami de le présenter à ses futurs électeurs. Pour commencer, M. Ambroise Vollard a montré une douzaine de ses compositions récentes à M. Albert Besnard qui n’a pas manifesté publiquement son sentiment ; mais on peut craindre qu’avec ses collègues les choses se passent moins bien. Ce peintre russe, jeune et de talent, n’a qu’un défaut : il a la passion des cartes, et la dame de pique lui fait faire bien des bêtises, car il pratique un jeu si désordonné que la malchance s’acharne sur lui avec une rare continuité. Les mauvaises langues prétendent que son mar-chand profite de cette particularité pour l’inviter à dîner, le jour même où il lui remet sa mensualité. Après le repas, on fait un petit poker, et le marchand regagne intégralement la somme qu’il a remise dans l’après-midi à son poulain. Si non e vero… M. Jean Guiffrey, Conservateur du Louvre, a publié un article dans le Matin, à propos de l’expo-sition, dans la Salle des Primitifs Français, du Buis-son Ardent, augmenté des deux panneaux qui l’accom-pagnaient primitivement, et qui se trouvaient, l’un en Hollande, l’autre en Belgique. Et M. Guiffrey loue la clairvoyance du Conservateur du Musée de Bruxelles qui remarqua les analogies existant entre le tableau d’Aix-en-Provence et un de ses panneaux quand celui-ci passa séparément en vente publique à Paris. M. Guiffrey eût pu ajouter que si les conserva-teurs du Louvre eussent été doués de la même clairvoyance, ce panneau serait resté en France, au lieu d’être acquis par un Musée étranger. G. CHARENSOL Variations sur la Peinture, par Albert Sarraut (Edi-tions des Quatre-Chemins). Voici le texte de la brillante conférence prononcée par notre s confrère » Sarraut lors de l’exposition de la collection privée de M. Paul Guillaume à la Galerie Bernheim. Avant d’être ambassadeur de France, Ministre de l’Intérieur, gouverneur général (alias vice-roi) de l’Indochine, M. Albert Sarraut a été critique d’art. N’est-il point d’ailleurs un des rares politiques qui portent à la peinture moderne un intérêt ardent et passionné? Collectionneur de dessins de Degas, de Guys et de Maillol, M. Albert Sarraut suit d’autre part, les oeuvres des jeunes artistes avec une attention qui ne se dément jamais.Son essai révèle une claire intelligence, une vision originale, une conception vivante de la peinture actuelle. W. G. Histoire de l’Art, d’André Michel, tome VIII. L’Art en Europe et en Amérique au XIXe siècle et au début du XXe siècle. Troisième partie. Index d’en-semble et table générale. (Armand Colin.) A l’heure où toute une école de critique moderne se préoccupe de renouveler l’histoire de l’art, en abordant immédiatement l’oeuvre d’art par l’inter-prétation plastique in se (morphologie et psychologie des formes) et en n’attribuant plus aux considérations circonstancielles qu’un rôle second, la revue Formes se doit de rendre hommage à l’immense effort de cristallisation historique réalisé par l’Histoire de l’Art d’André Michel, conçue en 1896, et enfin terminée. Cet ouvrage est bien l’expression la plus parfaite de l’histoire de l’art selon la méthode de Taine — dont André Michel aimait à se dire le disciple — méthode qui n’aborde encore l’oeuvre d’art que d’une façon médiate, en s’appuyant sur la critique externe (considérations de milieu et de temps), l’examen des documents, la biographie psy-chologique, et n’effleure encore la morphologie que par son côté le plus extérieur (par exemple le sujet). Comme tel, cet ouvrage est un admirable instrument de travail qui doit figurer dans la bibliothèque de tout historien d’art digne de ce nom, et dont le maniement commode est particulièrement précieux pour le a philosophe des formes » dont des essais des plus originaux restent hasardeux, s’ils ne s’appuient sur la plus solide érudition archéologique. G. BAZIN IMPRESSIONS A. B. C. A. VICHGNAC, IMPRIM.-ÉDIT., 122, BOUL. MURAT LE GÉRANT : FEND ART DOC