ornée de belles stalactites, l’une des plus amples et des plus grandioses de la grotte, une scène peinte en rouge et en noir est des plus originales. Elle comprend deux équidés allant en sens opposé. Ils sont recou-verts de très nombreuses ponctuations qui débordent d’ailleurs autour des corps. Ils sont entourés de six mains très fines, cernées de noir. Sur le cheval de droite, on remarque un énorme brochet rouge de 1 m. 15 de long et un arc de cercle de la même cou-leur. Sur l’équidé de gauche, 7 signes rouges en forme de croissants, ou plutôt de têtes de crosse, qui sont peut-être la stylisation de la main (pouce négatif). Le tout est peint sur un pan de roche calcaire dont une extrémité rappelle, par sa forme même, la tête d’un cheval silhouettée. Les mains peuvent marquer la prise de possession de l’homme sur les chevaux et les points se rapporter, comme chez les Australiens, à une scène de multiplica-tion animale ou de sacrifice de l’animal. Mais il semble que l’interprétation en blessures de ces diverses taches est contredite par l’examen attentif des docu• ments archéologiques de la grotte. En effet, plusieurs fois les ponctuations sont représentées en dehors de toute figuration animale, quelquefois seules, d’autres fois groupées autour d’une main. Si nous remarquons que les ponctuations et les mains accompagnent l’art dans sa première phase, il nous sera permis de placer cette scène si originale dans le cadre aurignacien, mais dans un aurignacien avancé, à cause du redoublement des jambes et à cause de la tendance de la peinture à déborder sur tout le corps. L’EXPOSITION D’ART AFRICAIN ET D’ART OCÉANIE AU THÉATRE PIGALLE PAR ALBERT SAUTIER L’exposition d’art africain et d’art océanien au Théatre Pigalle nous introduit dans un domaine sacré, celui d’une mystique primitive. Jamais expo-sition semblable ne fut réalisée avec autant de cons-cience. Celle qui eut lieu en 1924 au Pavillon de Marsan avait été conçue selon un plan purement ethnographique. L’exposition au Théâtre Pigalle poursuit un objet différent. Sa fin est esthétique. Une rigueur extrême, rigueur dont nous félicitons vivement MM. Marquetty et Pencher, a déterminé le choix des pièces exposées. Les premières collec-tions : celle du Musée du Trocadéro, celles de MM. Ascher, Bruce, Chadourne, Andorseur, Chau-vet, de Miré, Derain, Deslouis, Paul Guillaume, Bela Hein, Level, Lipchitz, Pierre Loeb, Mettler, Moriss, Percier, Picasso, Poncesson, Ratton, Georges Salles, Raphaël Store, Tristan Tzara, Vignier sont représentées ici par leurs pièces les plus significatives. Ce qui frappe en premier lieu le visiteur qui pé-nètre au Théâtre Pigalle, c’est la force élémentaire, la violence féroce de certains masques démoniaques. L’épouvante de l’homme primitif dans la pénombre 12 de la forêt vierge s’empare de nous et nous pénètre. Mais ce n’est là qu’une première impression. Nous nous apercevons bientôt qu’aucun art n’obéit à des lois aussi strictes que la sculpture de l’Afrique Noire. C’est une architecture sévère de blocs de bois, ordon-nés selon le principe d’une symétrie absolue. Et pourtant la sculpture nègre n’a rien de la frontalité de la statuaire archaïque grecque, qui semble liée au fond du bas-relief dont elle est issue. Elle affirme la troisième dimension par des moyens sculpturaux en organisant l’espace en profondeur. Par contre la sculpture océanienne (à l’exception de la Nouvelle-Calédonie et de l’Ile de Pâques) ne s’écarte guère du bas-relief. Elle reste franchement décorative. La couleur, d’une virulence joyeuse et barbare, le décor gravé, les plumes, les crins, les coquillages, les incrustations de nacre, le tatouage, etc., y tiennent une place prépondérante. Si l’on peut comparer la sculpture nègre à celle de l’ancienne Égypte, on serait tenté d’établir un parallèle entre l’art océanien et l’art de Byzance. Parmi les pièces qui figurent au Théatre Pigalle