LE MARCHÉ MONDIAL DES ARTS PAR ALBERT SAUTIER En inaugurant cette rubrique, nous tenons à définir l’objet de notre activité qui est de renseigner nos lecteurs sur les possibilités, les tendances du marché mondial des arts, de les guider à travers les différents domaines du commerce d’art ; enfin, de présenter les principales maisons d’antiquités et les collections dignes d’intérêt. Tout en nous promettant de suivre avec unc atten-tion soutenue le développement des marchés de New-York, de Londres, d’Amsterdam etc. et d’en tirer des enseignements utiles, nous accepterons toutes les suggestions et nous nous, mettrons au service de toutes les initiatives susceptibles de rendre au marché de Paris l’importance qu’une politique de fiscalité écrasante et maladroite tend à réduire d’année en année.. Nous nous proposons de réserver dans nos chroniques une large place aux Arts Asiatiques, Américains, Nègres, Océaniens et Populaires dont Paris est le marché naturel, grâce aux apports des civilisations extrêmement variées du vaste Empire Colonial Français. LE MARCHE des ARTS ASIATIQUES ET EXOTIQUES en 1929 Il n’y eut à Paris en 1929 aucune vente d’Art chinois susceptible de retenir l’attention d’un public international. Les quelques ventes Lair-Dubreuil, Flagel, Portier (23-24 janvier, 22 niai et 18-19 décem-bre) proposaient des oeuvres d’une valeur assez médiocre à des taux qui n’étaient guère destinés à recommander aux vendeurs, le marché de Paris. On y vit d’intéressants spécimens de la céramique funéraire des époques Han, Wei et T’ang, quelques grès Song, de nombreux grès émaillés Ming et des blancs de Chine, des assiettes, des familles verte et rose, mais aucune sculpture de Haute Epoque, aucun vase Kangshi qui pût rivaliser de beauté avec les pièces des ventes de Londres et de Berlin. Malgré les efforts de MM. Lair-Dubreuil, Flagel et Portier, malgré la propagande accomplie par les Musées Cernuschi et Guimet, le public parisien ne paraît pas encore disposé à apprécier l’Art de l’An-cienne Chine (révélé par les découvertes de Chavannes, Pelliot, Lartigue, Des Voisins, Ségalen, etc.), tandis que les réserves des collections françaises de porce-laines Ming, Kangshi et Kienlong semblent s’ap-pauvrir. En Allemagne, le mouvement en faveur de l’Art de Chine des premiers siècles a été stimulé par la belle exposition d’Art chinois (qui eut lieu, l’an dernier, à Berlin), et par une vaste littérature de vulga-risation. La vente Breuer-Perzynski du 11 mai, et la vente Th.-E. Simon du 5 novembre (toutes les deux chez Cassirer et Helbing à Berlin) ont obtenu un grand succès. A la vente Breuer, certains grès Song et Yuen qui se vendraient à Paris de zoo à 1.000 francs, furent enlevés aux enchères de 1.000 à 5.000 francs. On a offert 123.000 francs pour une peinture japo-naise de l’Ecole Kamakoura, et les belles laques chinoises et japonaises furent âprement disputées. A la vente Simon, deux figurines Wei en terre cuite se vendirent 32.400 francs, prix inconnu sur le marché de Paris. A Stuttgart, à Francfort, à Cologne, ont eu lieu également des ventes de céramique funéraire de haute époque dans des con-ditions plus favorables pour le vendeur qu’à Paris. Pour les porcelaines des époques Ming, Kangshi, Yung Ching et Kienlong, Londres demeure le grand marché alimenté par les trésors venus de l’épar-pillement des grandes fortunes anglaises. Le 14 mars, une garniture de cheminée de cinq pièces de l’époque Yung Ching provenant de la collection Earl of Crawford, fut vendue 66o.000 francs chez Christies La collection Johnstone vendue le 4 Juin, également chez Christies, réalisa environ trois millions (un bol Kan-gshi, émail sur biscuit, fond noir à réserves, décor oiseaux et fleurs, fut poussé jusqu’à 465.000 francs). Le 12 juin, une autre vente donna un total de 1.86o.000 francs dont 126.o0o pour une garniture de cinq pièces de la famille rose, Kienlong. Il n’y eut à Paris en 1929, aucune grande vente d’art Khmer et d’art Siamois. Cependant, on vendait à New-York la collection Heeramaneck (Anderson’s Gallery), à Bruxelles la collection A. de Mol, (Galerie Giroux), à Amsterdam la collection Noi Pra Young. Il y a des années que l’on ne voit plus à l’Hôtel Drouot des tapis d’Orient anciens d’une réelle importance. Seul, un tapis, dit polonais, attei-gnit à une vente en 1929, l’enchère de 75.00o francs, alors qu’à Londres, deux magnifiques tapis Ispahan furent achetés 150.000 francs chacun, par un mar-chand parisien et qu’à Berlin, des tapis d’Asie Mineure du xvle siècle de la collection V. Bode ont dépassé ioo.000 francs. (Un tapis turc à fond blanc dont la bordure manquait d’un côté, a fait 165.00o francs.) Paris ne semble conserver que le monopole du marché des arts Pré colombien et Océanien (à côté, bien entendu de celui de la peinture du xvme siècle et moderne). Nous avons assisté à une série de belles ventes, comme celle de la collection Haenflein (Mexique, Costarica, Pérou, 25-26 mars), les ventes Lair-Dubreuil, Flagel, Portier du 29-30 avril (Mexique, Pérou), du 8-9 novembre (Océanie, Afrique et Amérique) et du 2-3 décembre (poteries de Nazca, Costa-Rica, Art Nègre). Nous avons constaté que si FIND ART, DOC