style gothique devenu au xve siècle l’art national des pays anglo-saxons et germaniques s’éloigne par son esprit de l’idéal de noblesse et de clarté qui dis-tingue les oeuvres des contemporains de Philippe-Auguste et de saint Louis. Que l’on compare la chapelle d’Henri VII à Westminster avec la cathédrale de Reims et l’on comprendra mieux quel abîme sépare les deux conceptions. Ici, à travers l’ornementation exubé-rante, faite d’admirables guirlandes de feuillage encadrant tout un peuple de statues, on sent la belle ordonnance d’un plan logiquement construit dont les multiples détails viennent se subordonner har-monieusement à une idée centrale. C’est déjà l’esprit classique. Là, au contraire règne une fantaisie quelque peu désordonnée et l’on sent un effort suprême pour échapper aux nécessités du monde réel, dans ces étranges pendentifs de profil hélicoidal qui cons-tellent la voûte, semblables à de monstrueux madré-pores lancés dans l’espace. Louis BRÉHIER. L’esprit de l’art gothique est international. C’est-à-dire ni spécifiquement roman, ni spécifiquement ger-manique. Il est né du sentiment d’unité du monde médiéval de l’occident : unus deus, uns fides, una ratio. Comme dans l’Hellade du vine et du vue siècles avant Jésus-Christ, la forme gothique procède des sources les plus disparates : Jumièges se trouve en Normandie; l’école du scriptorium de Winchester lance sa forme à travers tout l’Ouest, jusqu’aux frontières des Pyrénées; Chartres se trouve au coeur de la Gaule; Pontigny sur le sol bourguignon, où des racines de mots germaniques se rencontrent jusqu’au XIIIe siècle. Et Assise? — Qui pourrait jamais expliquer la monumentalité latine de ce monastère, le plus profondément gothique qui soit en Italie par des détails stylistiques provenant de l’Ouest? Ce n’est pas tout. Comment expliquer Sta. Croce à Florence? Que signifient les églises allemandes à arcades avec des halles? : SOEST, SANKT MARIA ZUR ‘MESE, DINKELSBUEHL, SALZBURG, le chœur de l’Eglise des Franciscains? Lorsque les maîtres de Reims et Giovanni Pisano créèrent leurs œuvres, ils eurent devant leurs yeux la transfiguration de la forme antique. La naissance pas-sionnée de la Pietà, c’est-à-dire le réalisme psychologique de l’art gothique, survient dans les pays du centre, dans l’Allemagne en même temps que les mystiques (Meister Eckart, Suso). Le naturalisme dernier de l’art gothique rayonne de l’Espagne (Burgos) jusqu’à Cracovie, et peut-être qu’un jcur on y incorporera la soi-disant Première Renaissance, le Quattrocento de l’Italie. Avec l’art gothique, situé au seuil des temps modernes, les peuples occidentaux deviennent majeurs et prennent conscience de leurs responsabilités. L’Art gothique est avant une réalité psychologique. (à suivre) HANS KARLINGER. LES PIERRES GRAVEES DE L’ASIE ANTERIEURE Quand, au cours du quatrième millénaire avant Père chrétienne, les Sumériens commencèrent à écrire sur des tablettes d’argile, il leur parut peu pratique d’authentiquer les documents par l’appo-sition de sceaux plats dont l’usage était antérieure-ment établi et ils inventèrent des sceaux en forme de rouleaux cylindriques, gravés sur la nappe. De la basse vallée de l’Euphrate ces cylindres se répandirent dans les régions voisines en même temps que l’écri-ture cunéiforme; ils furent même adoptés en Egypte, mais dans la vallée du Nil, comme sur le plateau de Cappadoce, ils ne parvinrent pas à supplanter le cachet plat. Pendant près de trois mille ans on a gravé des cylindres; vers la fin de l’empire assyrien, au vine siècle, les sceaux plats paraissent à nouveau en Mésopotamie et peu à peu se substituent aux cylindres, dont on ne trouve plus d’empreintes sur les tablettes baby-loniennes de l’époque séleucide. La pierre est la matière sur laquelle, dans l’antiquité, on grave les sceaux; on utilise aussi la columelle de certains gastorépodes, le bois, le métal, l’or, l’ivoire. Chaque région, chaque période emploie de préférence telle ou telle pierre : calcaire, marbre, serpentine, lapis-lazuli, hématite, agate… La forme même et les dimensions de l’intaille varient beaucoup. Les cachets plats primitifs sont tantôt des figures géométriques simples, calottes sphériques, plaquettes, etc…, et tantôt des animaux sculptés en relief, bovidés, oiseaux de proie, têtes de lions, pro-tomes accolés, etc… Les cachets cylindriques sont le plus souvent des cylindres parfaits, mais dans les 15 FIND ART DOC