de produire à bon marché des ouvrages d’un goût sobre et raffiné, on a cédé à l’orgueilleuse tentation de faire oeuvre d’opulence, en fer forgé, ivoire et or, bois rares — de coûteuse élaboration. Décevante est la section russe. Là où nous espérions, quand même, avoir à noter les prémices d’une renaissance, nous nous sommes heurtés à des réalités représentant pour nous un très lointain passé. Les produits exposés là paraissent dater — et datent en effet — d’avant l’introduction du machinisme dans l’industrie des peuples civilisés. Ce ne sont que menus objets taillés au couteau, travaux de patience sur ivoire — comme si le temps, à notre époque, avait cessé de valoir money — tissus fabriqués et ornés à la main, selon les techniques les plus manifestement primitives. Quant à cette exhibition de costumes populaires provinciaux, n’a-t-elle pas un indéniable caractère de réaction? La révolution française a contribué à en proscrire l’usage dans l’Europe entière; et l’unification des manières de se vêtir signifie un pas accompli vers l’idéal d’égalité. Rassurante et, par quelques côtés, exaltante, est la section suédoise. En verrerie, tissage, travail de métal, céramique, la production d’objets d’usage courant est la préoccupation dominante. L’agrément des formes substitué à la préciosité de la matière. L’ouvrage de fonte préféré à l’ouvrage de forge. La f atroce mécaniquement décorée, préférée aux effets de grand feu. L’article de bazar haussé à la dignité d’objet d’art.  » Pour bien comprendre le caractère de l’art décoratif moderne de la Suède — nous a dit textuellement M. Erik Wettergren, directeur des collections d’art décoratif du Musée de Stockholm — il faut songer à sa riche complexité et à la profonde différence de nature qui lui ont donné sa forme. Ses racines plongent à travers les siècles et, si l’on veut 122 grosso modo le caractériser, on pourrait dire qu’il y a trois racines principales qui donnent au faîte de l’arbre sa vie et son caractère. « L’une de ces racines s’attache directement au sol même du pays, c’est le caractère national rustique de notre art appliqué. Là, déjà, nous trouvons une série de couleurs de la plus grande variété, couleurs multiples et diverses comme le pays lui-même. « Seconde racine  » Il n’est pas douteux que les influen-ces de l’époque historique que nous avons le plus facilement et le plus réellement assimilées nous sont venues de France, et pendant notre •• grand  » siècle artistique, le xvine, aucun pays n’a mieux compris que la Suède la force, la grâce et l’harmonie de la culture artistique française. La cons-truction, et surtout l’aménagement du château royal de Stockholm servit à répandre ce goût français qui, cependant, ne fut pas copié sans que leSuédois y mît un peu de son âme; mais il prit dans ses mains un cachet de simplicité sobre et de clarté architecturale. Si le rococo de Meissonier etle style Louis XVI de Delaforge peuvent être comparés à une rose somptueuse, la rose  » la France « , à son plus haut degré de civilisation, la Suède qui s’imprégna de cet art serait la fleur que le général C. J. L. Almgkist considérait comme le symbole du caractère suédois, la simple églantine,  » figure de la pauvreté, du charme sauvage et de la pureté « . Le résultat fut une manière bourgeoise, affinée mais bien de son terroir, qui a trouvé son expression dans des meubles, des faiences, des objets de verre et d’argent qui témoignent d’une bonne habileté de main et d’un goût artistique très sain. L’influence française eut encore un second printemps lorsque Berna-dotte, comme roi de Suède, apporta le sévère style militaire de l’épopée napoléonienne, mais celui-là encore devint plus simple, il s’adapta d’une manière plus marquée à la vie quotidienne que s’il avait été dessiné dans les ateliers de Percier et Fontaine.  » Vint le siè-cle de l’indus-trialisme : et nous vivons toujours avec ce qui le came-téeise, l’éclec-tisme. Mais de toutes les in-fluences variées qui viennent de Chine et d’Es-pagne, d’Angle-terre et d’Ita-lie, se dégage un élément pu-rement moder-ne, qui est in-ternational et dont l’essence est le rationa-lisme. On peut dire de lui que c’est un effort pour soumettre le travail mé-canique à la do-mination du goût rationnel, pour créer des objets adaptés aux besoins des hommes de no-tre temps, sans rechercher à à tout prix l’originalité, • DAVID • par lynx JOFAISSON