LES ÉLEGANCES MASCULINES Nous n’estimons plus que le costume soit une chose vaine. Lorsqu’il n’y met pas une affectation odieuse, lorsqu’il y met seulement des soins heureux et dis-crets, un homme élégant est à coup sûr mieux vu qu’un ours. Croyez que c’est un grand progrès, et que c’est un progrès récent. Des générations entières de Francais ont eu à cet égard d’autres idées. Elles ont pensé qu’un homme digne de ce nom n’avait pas souci de son costume parce qu’un tel souci n’était pas viril. Elles étaient ainsi en contradiction avec tout l’univers, avec cette même nature que l’on prétendait, à la même époque, diviniser. Car, sur la terre, tous les mâles de toutes les espèces disposent, pour plaire et pour paraître, d’une robe plus magnifique que le tendre objet de leurs pensées. Jusqu’aux infusoires dans leurs gouttes d’eau. Ils sont mer-veilleusement parés. Leurs mâles lorsqu’ils entreprennent de séduire, dans ce cercle qui représente en somme le monde, on les voit danser d l’envi autour de leur belle. Et celle-là daigne, au terme de la fan-tasia, faire connaître son choix. Chez les loups, cette danse de l’amour a, dit-on, son équivalent dans un combat à mort. Voilà l’ordre véritable de l’univers. L’homme étant le seul animal qui s’habille, l’homme étant le seul être qui substitue de certaines règles conven-tionnelles, de certaines contraintes gé-nérales à la simple rivalité des forces individuelles, et l’homme naissant aussi nu qu’un escargot sans coquille, l’homme enfin étant le seul être qui souffre et jouisse d’une idée tout à fait claire de la beauté, vous pouvez déduire de toutes ces considérations l’importance du costume. Autant qu’une nécessité, autant qu’une protection, il est parure, ornement, séduction. Fait de nos mains, il est bien — voilà le grand mot — un art. Les hommes du XIX. siècle étaient insensés de le mépriser. Je suis mysté-rieusement sûr que le dédain qu’ils ont gagné de leurs compagnes, cette soif d’une égalité absurde qui les dévore, vient en grande partie de là. Vous souvenez-vous du portrait de Renan, par. Bonnat ? Cette redingote pareille d un sac, cc pantalon informe, cette tête inculte, ces ongles couleur de corne. On vit des hommes d’État, on vit des ministres se faire gloire d’un vête-ment hideux et malpropre. Grâce au ciel, le temps a passé de ces mœurs abominables. Aujourd’hui, nous nous tenons tous, nous nous lavons et nous habillons. S’il n’est permis qu’a un petit nombre d’atteindre à ce degré d’invention calme et de raffinement qui seul fait l’élégance, tous les hommes du moins ont heureusement le même dégoût d’un ignoble costume que d’un acte vil. ABANDON DES VÊTEMENTS A TAILLE A l’Exposition des Arts, au Grand Palais, entre les robes scintillantes, éblouissantes, et les robes strictes et nues, les dames étant plus que jamais vouées aux extrêmes, pour tant de com-plets que vous admirerez, à peine si vous distinguerez une redingote, une seule, et deux ou trois jaquettes. Cela est raisonnable. Cela est à l’image de la réalité. C’est un fait que le vêtement d taille est pour ainsi dire abandonné. Il nous semble archaïque, il vieillit son homme, il surprend nos veux. En dehors de l’église, pour habiller le père et le fiancé que conduisent à l’autel une grande fille aux yeux baissés, et en dehors du pesage d’Auteuil et de Longchamp, où, dites-moi, découvrez-vous une redingote ?Celui qui en est paré n’imagine pas même qu’il pourra-et s’en aller d pied dans les rues. Il a soin de ne laisser qu’au der-nier moment la voiture qui le garde de la curiosité. La voilà, cette redingote de nos pères. Cumberland y a pensé. Grâce d Cum-berland, elle n’est pas absente. Elle est à vastes revers de soie unie, avec une courte jupe assez bombée, pareille à celle, quadragénaire mon ami, que tous les jours tu portais, lorsque tu avais vingt ans. Tu préférais oue le revers fût à gros grains, et tu laissais le noir absolu aux vieux hommes, choisissant pour toi un gris de fer, au lieu que celle-ci est d’un sombre, pointillé de blanc, qui ne te plat pas tout à fait… O les premières visites aux amies de ta mère! T’en souviens-tu? Et pré-voyais-tu que la machine ronde, loi dessus, irait à ce train d’enfer? • La jaquette est moins abandonnée. Elle est pourtant dangereuse, Dieu sait! Un peu de ventre que vous ayez, la jaquette l’étalera ; c’est une devanture. Si vous étiez arrivé d cet âge du majes-tueux dont parle Brillat-Savarin, vous vous en réjouiriez. Mais qui donc aujourd’hui accepte avec résignation une majesté pareille ? On s’évertue. On se prive du boire et du manger. On s’enorgueillit d cinquante ans d’une taille restée mince, et de ce petit air juvénile dû à cent moyens • naturels, depuis la gymnastique et l’eau coulante jusqu’à la chute d’une vaine moustache. Gros ou minces, nos anciens pour-raient porter la jaquette, eux, du moins. S’ils ne le font guère, nous allons voir pourquoi. L’on essaie pourtant… Com-ment dire? L’on essaie de la galvaniser. On essaie de lui Ôter sa grande mine de -cérémonie, pour lui donner des grâces estivales. O Rosses in e une d’un gris nolo G. •L. Manuel N., UN NOUVEAU COSTUME, DIT • EIMGANTE bossué POUR AIMPLACER 5,0 JAQUETTE ‘-irorder,s ns cmums de perle en fil à fil, qui ferait bien même le ‘matin, aux Acacias, avant le Grand Prix. La forme en est «igné, à l’hiron-delle. Et Carotte, pour mieux nous ama-douer encore, pour mieux nous tenter, l’a arrondie et raccourcie. Il a même essayé de résoudre le problème du couvre-chef, qui est d’une invincible difficulté depuis l’éclipse du tube. Il a osé cette coiffure de feutre plein et dur, tronqué, au sommet arrondi, qui n’est Pas plus haut, seulement plus carré que le melon, 8x