les pelotes de laines des différentes teintes préparées en nombre de brins voulu, et sur le bàton de lisse », à hauteur de ses yeux, un papier quadrillé sur lequel est le dessin à exécuter, traduit en teintes conventionnelles et dont chaque carreau correspond à un point ou noeud. C’est ce qu’on appelle « la mise en carte ,. L’ouvrière prend un nombre de brins déterminé (variable selon les tapis) et les lie au moyen d’un noeud coulant sur deux fils successifs de la chaîne (fil pair et fil impair ). Elle fera ainsi un « point »,d’où le nom générique de tapis au point noué ». Elle exécute ensuite le « tissage », opération destinée à séparer les rangs de points en les fixant; pour cela, elle insère un fil de coton, de jute ou de chanvre, par un aller et retour dans toute la largeur du tapis, le faisant passer d’abord de la droite à la gauche et simplement entre les deux nappes de la chaîne. Puis, au retour, avant de passer son fil, elle tire sur les « fils de lisse » qui, de ce fait, ramènent en avant de la première chaîne les fils formant la chaîne arrière. Enfin, après avoir consolidé définitivement son oeuvre, l’ouvrière tasse la laine avec un lourd peigne de fer, et égalise aux ciseaux les brins de laine. Elle peut alors passer à une autre rangée de points, et lorsque la partie exécutée atteint une certaine hauteur, l’ouvrière, pour garder sa commodité, l’enroulera sur le rouleau inférieur. Ce n’est là, évidemment, que le gros travail du tapis, et une pièce bien finie suppose toute une série d’opérations annexes et de retouches qui constitueront sa finition. C’est un spectacle curieux de voir au travail une ouvrière haute lisseuse exercée : les mains et les yeux sont toujours en mouvement, ceux-ci lisent la mise en carte, pour se reporter sans cesse au travail; la main gauche forme la boucle sur les deux fils de chaîne préa-lablement isolés, et la main droite la coupe immédiatement. Le triple mouvement se fait à une cadence qui ne permet guère au profane de décomposer l’opération. Une bonne ouvrière peut arriver à une moyenne de 1.200 noeuds à l’heure pour un tapis de difficulté moyenne, malgré la nécessité de changer de pelote de laine selon le coloris, et de s’interrompre fréquemment pour vérifier le nombre de points du coloris. Le nombre de points composant un tapis peut varier de 100 à 500 par mètre et peut ne pas être le même dans la hauteur que dans la largeur. Le nombre total de points, qui doit ainsi se compter au mètre carré, peut varier dans des proportions et dans une progression inattendues. Si un tapis de point très I 3G Métier pour le tapis au point noue vu par Verridre. l’ache compte 10.000 points au mètre carré, un autre en, point moyen en comptera 25.000, 30.000, 40.000 au. mètre, et les panneaux en Savonnerie du Palais de l’Élysée en comptent environ 240.000… C’est expliquer la différence de valeur marchande de deux tapis donnés, si l’on y ajoute encore ce double -fait que chaque point ou noeud peut se composer d’un nombre de brins de laine très variable, la laine elle-même pouvant, pour sa part, être d’une qualité plus ou moins belle, à supposer, enfin, que l’on n’emploie pas d’autres matières plus précieuses, telles que la soie. Le « tapis au point noué » est donc de nos jours fabriqué, à peu de choses près, selon les mêmes principes que ceux des Anciens. Sur le même métier, l’ouvrière noue un à un, à la main, tous les noeuds qui composeront-le tapis. On comprendra donc toute l’estime qu’il faut garder à_ cette technique d’une prodigieuse souplesse, si ancienne et si neuve à la fois, puisqu’elle a été capable de s’adapter aux diverses exigences des artistes de tous les temps, et qu’elle conserve dans notre siècle de progrès= lecharme de la belle oeuvre sortie des mains de l’artisan_ AKA.