La Technique du Tapis au Point noué. Onl’art croit encore assez communément que l’a véritable du tapis est dû et a été réservé long-temps à « l’Orient »; et par ce terme, on entend alors un Orient restreint dans son étendue comme dans son ancienneté, même et surtout si l’on a fondé son jugement sur les tapis rencontrés dans nos Musées, car les plus anciens, exécutés en Turquie d’Asie ou aux pays persans, datent du Moyen-Age. Or, l’art du tapis en général remonte indiscutablement à la plus haute antiquité, et était connu de l’Egypte à la Chine. Homère, Philostrate, Ovide, ont décrit son emploi et son rôle dans les civilisations méditerranéennes. Il semble bien, d’après Eugène Muntz (« La Tapisserie », Picard, Paris), que les Egyptiens se servaient du métier de haute lisse 3.000 ans avant notre ère, et le même auteur nous donne, d’après un vase antique du V` siècle avant Jésus.Christ, et, par conséquent, postérieur à peine de quelques centaines d’années aux événements, une reproduction du fameux métier de Pénélope, qui rappelle de façon frappante le métier de « haute lisse » employé par l’artisan oriental, comme de nos jours encore aux Gobelins. Mais on ignore davantage que la technique du tapis d’Orient ou tapis « au point noué , était connue et avait été importée en Europe, et en particulier en France, depuis le haut Moyen-Age, pour s’en tenir aux faits certains et éprouvés par la critique historique. Nous ne possédons pas de tapis pouvant rivaliser, pour l’ancienneté, avec certaines tapisseries ou tissages, tels que la célèbre tenture de Bayeux et nos vieilles tapisseries d’Arras ou des Flandres. Mais on pourrait déjà en trouver une explication plausible dans la diffé-rence de destination du tapis de pied, soumis à un usage beaucoup plus rude et étant, de ce fait, beaucoup plus périssable que la tenture murale. (Possède-t-on, d’ailleurs, des tapis d’Orient antérieurs au XIV` siècle?) Faute de documents, nous avons des « inventaires » qui nous en donnent une description suffisante pour ne pas laisser place au doute. Comme on le voit, dès ses débuts, l’histoire du « Tapis au point noué » en France, est pour ainsi dire parallèle à celle du « Tapis d’Orient » dans le Levant. Si, en France, le « Tapis de pié » ou « Tapis de Turquie » connut une certaine décadence aux XV’ et 154 XVI’ siècles, le roi Henri IV fit de gros efforts pour-relever l’industrie française par la création de manufac-tures destinées à affranchir le royaume du tribut de l’importation. En 1606, Pierre Dupont, de par un privilège du Roi, s’installe et fonde la première manufacture de « Tapis de Turquie ». En 1626, il s’associe avec l’un de ses élèves, Simon Lourdet, installé pour sa part à Chaillot, dans l’Hôpital de la Savonnerie (ainsi nommé parce que travaillant dans les locaux d’une manufacture de savon). En 1627, ils obtiennent pour une durée de 18 ans, la concession de « la fabrique et manufacture de toutes sortes de tapis et ouvrages du Levant, tant en or, argent, soye, qu’en fleuret et en laine >>. La célèbre manufacture de la Savonnerie était fondée, qui devait créer le tapis de style français et lui donner Vue partielle d’un atelier de mise en carte et de distribution des Laines.