OUS me semblez, ma chère cousine, enterrée au fond de votre province tout ignorante de ce qui se passe à Paris et de la mode nouvelle qui pré-side à la parure de nos appar-tements. Je vais donc tâcher de vous ensei-gner, sinon le bon ton, du moins le ton parisien. Vous me demandez si nous nous sommes installés depuis mon mariage dans le quartier du Marais. Fi donc ! Voilà qui est bon pour de vieilles familles jansénistes qui se plaisaient encore dans de funèbres hôtels construits sous Mazarin et décorés à la mode de Versailles. En vérité, il semble qu’au Marais on ne soit plus en Province sans être absolument à Paris. Parlez-moi de la rue de Beaune ou de la rue de la Chaise et d’un décor tapissé par l’excellent Falempin. Voilà qui est beau, voilà qui est bien, voilà qui sent le Paris d’aujourd’hui, comme cette façon d’aborder une femme : « Bôjour, Madame ! », avec un serrement de main à la mode anglaise, et, si l’on est dans un salon, un baiser du bout des lèvres sur le bout des doigts, différent du salut de cérémonie à charnière. De même, la parisienne ne doit pas se contenter, comme une petite bourgeoise, de dire qu’elle «est allée prendre l’air» : elle se sert de qualificatifs importés de Londres, comme elle prend des leçons d’armes, habillée d’une redingote ornée de brandebourgs, et 23 –