traduire en élévation l’intensité de la force d’expression de ses plans, la réalité de ce monde qui s’organise, s’enroule, se centri-fuge autour de ses noyaux ou de ses vides, un architecte ancien. Son action qui fait éclater le plan ancien annonce la fin d’une époque plus que le début d’une ère. C’est le séisme qui secoue provisoirement une organisation de l’espace qui a fait son temps. Scharoun lui-même donne la compréhension de ce fait lorsqu’il pose la question de la modification des « structures » sous les influences extérieures; son interprétation de l’abandon des struc-tures moyennageuses avec leur cohérence absolue, ses études d’urbanisme pour Berlin, son goût de l’histoire, prouvent qu’il est conscient de la fin d’un monde, donc de la fin d’une organisa-tion de l’espace humain. Son annonce, sa futuration du phéno-mène est l’éclatement du plan, son attachement au passé est le refus volontaire d’aller jusque dans le volume aussi loin que dans le parcours au sol, dont le plan traduit magnifiquement l’aventure. A ce titre, la Philharmonie de Berlin et le Geschwister-Scholl-Gymnasium de Lünen sont révélateurs. L’école, splendide démonstration de l’éclatement en plan, se relie au contexte architectural ancien de façon parfaite. Il y a continuité, intégration au stade de la réalité. La Philharmonie, isolée, est un monde intérieur où l’écartèle-ment spatial domine la grande loi du contenant et du contenu à laquelle Scharoun reste toujours, en lui-même, profondément fidèle. Monde où la fluidité des hommes utilisée en circulations volontairement contrastées mais non contradictoires, et où la fixation des hommes en de nombreux espaces cloisonnés aux for-mes imprévisibles sont les deux seuls matériaux utilisés par l’architecte. Vide, la Philharmonie est incompréhensible, pleine, c’est l’homme réuni en communion qui tente de garder son auto-nomie. A l’extérieur ne reste rien de la magie interne, sinon certains profils qui rappellent le goût de l’architecte pour l’espace gran-diose du dedans, son obsession de pétrification de la tente et son mépris du vocabulaire esthétique. Nous sommes avec cette réali-sation au seuil d’un drame. Ancienne définition du volume, ten-dance vers l’espace continu couvrant des fonctions diverses, écla-tement du plan, exaltation de la circulation, refus de l’esthéti que, ferment un monde et ouvrent des visions sur un futur. Mais déjà disciples et novateurs noient l’essentiel ou créent la confusion sur le message. Les uns s’attellent au problème de la tente et croient trouver une justification architecturale définitive dans le fait qu’ils avancent vers l’immatérialité par la première étape de la légèreté et de la souplesse (voiles, réseaux tridimen-tionneis, tentes, etc.). A la limite, d’autres passent de l’éclatement à la pulvérisation, à la fragmentation et allant cette fois jusqu’au volume, abandonnant définitivement la magie de la forme, font de la réalité architecture en fin de compte une addition d’objets pulvérisés. Certains tendent la réunion des deux sous la grande obsession moderne de la mobilité. Mais les plus inquiétants restent ceux qui superposent la pro-fusion et le débridement esthétique à l’éclatement de la forme générale ; ils créent une confusion définitive en faisant disparaître la discipline sous-jacente, colonne vertébrale, ossature de toute véritable architecture. Ils devraient méditer sur le dessin fait en 1922 par Hans Scharoun pour un immeuble de bureaux à Konig-sberg, et apprécier la rigueur et la discipline d’un projet qui a un rapport intime avec l’ensemble de son oeuvre. Mais le drame des grands précurseurs réside toujours dans leur héritage. Claude Parent. 39 1 -11111 —ter IMMEUBLES ROMEO ET JULIETTE STUTTGART