• EMPLOI D’UN VOCABULAIRE PROCHE DE CELUI • • • • • • • • • • • • • • • • • faces mirima et automatiques, nous ouvre une autre attitude vis-à-vis de la conception même de l’espace. Nous pouvons ainsi imaginer l’habitat d’une autre façon que la préfabrication classique l’a tait jusqu’à présent. Celle-ci, malgré une volonté d’obtenir des variantes d’espace à travers un système des panneaux interchangeables, joints universels, etc., n’a cessé d’être une « architecture » — ce qui veut dire un espace struc-turé a priori, donc rigide dans son emploi. D’où l’ennui profond qui caractérise tout habitat préfabriqué répété en grande quan-tité, et paradoxe économique qui fait que le système mécanisé devient plus cher que n’importe quel système artisanal, si l’on exige des variantes. Et pourtant l’exigence de variantes dans l’habitat n’est pas une survivance sentimentale du passé, c’est une nécessité vitale correspondant à la complexité de la structure sociale même. Il faut donc que la forme du logis, issue de la machine ou non, le reflète. Si nous abandonnons le souci ce faire de « l’architecture » et de planifier jusqu’au bout, nous pouvons résoudre la contradic-tion variété de formes de l’habitat d’une part; nécessité écono-mique de la répétition de ses parties composantes, d’autre part. Il faut standardiser au maximum et produire en grande quan-tité les parties de l’habitat qui le supportent mieux, c’est-à-dire celles dont l’utilisation est la plus connue, et qui sont le plus mécanisées : tous les rangements, sanitaires, cuisines. Ces unités seront en matériaux légers, petits de taille; elles seront donc faciles et économiques à transporter sur tous les chantiers du pays à partir de quelques grandes usines (elles ne dépasseront pas le poids et la taille d’une voiture de tourisme). De son côté, l’urbanisme nous offrira des sols suspendus prêts à recevoir l’habitat. P. K. François Dallegret • LE DRUG, MONTREAL. p. 87 Ce restaurant, qui aurait pu être vraiment mou et mobile, a été sujet à bien des commentaires, appréciations publiques et repor-tages parce qu’il représente un effort d’opportunité et de contraintes personnelles en vue de créer une image organique: et mécanique. J’ai recherché un nouveau moyen de plaire ! C’est une « innovation » en tant qu’environnement public mais aussi un « anti-design » ! Une expérience psychologique prétexte a tropisme. Il y a d’abord un étonnement, une décontenance, un certain malaise ou « inconfort » inhabituel, par exemple, vis-à-vis de certains détails tels les piétements qui réveillent chez certains des envies de compléter le travail inconscient des volumes qui fuient, qui se coupent et des espaces qui se découvrent toujours différents suivant l’angle du regard. Je l’ai fait tout blanc, mais le blanc se tachera ! on « déco-rera » la place d’ici peu ; cela deviendra alors une œuvre publi-que, pourquoi pas? (c’est bien mais les enfants — mes plus grands adeptes, n’y viendront plus), et non mouvement historique. Cela sera un « happening », tout le monde y ajoutera quelque chose ; le décorateur le peindra en noir, avec des fleurs roses pour que cela soit sûrement plus chaud, confortable et « joli ». F. D. Charles Deaton • L’ARCHITECTURE SCULPTURE. p. 88 Je crois que l’architecture sculpturale a précédé d’un bon nombre d’années l’architecture angulaire et rectiligne. Il semble que l’être humain a vécu au milieu des collines et dans les cavernes aux lignes courbes, sous des toits de chaume aux formes arrondies et dans /es huttes en mortier bien avant que la géomé-trie d’Euclide ne donne un aspect rectiligne à nos cités. Nous sommes tellement accoutumés de nos jours au quadrillage de nos villes que les formes arrondies nous paraissent une innovation, lorsqu’on les utilise en construction. Les exigences de la structure sont les raisons pour lesquelles la hutte de terre battue a toujours conservé sa forme de cou-pole. Ce sont des exigences culturelles qui, de la même façon, ont gardé leurs formes courbes rivées au sol. Maintenant, grâce à la résistance des métaux modernes, nous pouvons non seulement achever l’autre moitié de la sphère mais encore nous libérer des attaches terrestres et nous étendre en hauteur au maximum, pour ainsi dire flotter dans l’air. La vie dans un intérieOr aux lignes courbes n’est pas nouvelle, bien que la construction d’une maison en forme d’oeuf ait été taxée à tort d’innovation. Déjà depuis longtemps, des maisons sphériques ou en forme de champignons sont apparues dans les anciennes imageries de contes de fées. Même de nos jours, de nombreuses cavernes sont encore meublées et habitées. Les archi-tectes de la marine et les ingénieurs d’aérodynamique continuent d’aménager des locaux dans des structures courbes. La question n’est donc pas à présent de se demander si oui ou non l’archi-tecture sculpturale est une nouveauté, mais de déterminer com-ment elle peut se développer et s’accroître, en tant que partie de l’art architectural. Ch. D. Constant • NEW-BABYLON. p. 92-93 L’automation nous promet une production qui satisfera les besoins de tous les hommes en supprimant le travail humain. Celui-ci ne sera plus indispensable. L’homme pourra pour la pre-mière fois abandonner son existence de bête utile et se ranger au niveau d’un être créateur. Si les nécessités primordiales peuvent être satisfaites automa-tiquement sans que l’homme y participe, une nouvelle ère com-mencera. Ce que nous considérons actuellement comme « temps libre » deviendra alors notre temps à vivre. Vivre, cela voulait dire pour la Plus grande partie des hommes jusqu’à présent « rester en vie ». L’automation permettra alors de disposer librement de toute notre énerg,’e vitale. Le privilège de l’oisiveté des classes sociales DE LA SCULPTURE. • • • • • • • • • • • • • • • • • supérieures des époques précédentes sera partagé par tous. Les possibilités créatives de chacun pourront se développe- librement grâce au style de vie dirigé par de nouvelles règles au jeu. L’énorme puissance de l’humanité ne sera plus gâchée pat le travail qui sera confié à la machine. Pour la première fois une culture pourra naître à laquelle tous carticiperont et qui appar-tiendra à tous. Toute action automatique — c’est-à-dire toute action inhumaine — sera bannie, l’homme ne sera qu’explora-teur et créateur de sa vie dans le vrai sens ae l’homo ludens. Ni les réticences culturelles des « cultivés », ni les structures sclérosées de la société du passé refusant d’accepter /es pers-pectives d’une production illimitée re pourront éviter l’avènement d’une « société de profusion ». Tôt ou tard l’homme prendra possession de ce qui lui appartient. Il jouera, car aucun travail n’accaparera et ne consumera sa vie. Il sera libre, plus libre qu’il ne l’a jamais été, plus libre que ne l’ont été les plus puis-sants de cette terre, car il disposera des moyens à l’aide desquels il pourra créer sa liberté. Pour la première fois, sa vie sera une vie humaine. L’homme sera pour la première fois un homme complet ; car il créera son existence lui-même et formera sa vie lui-même. Ses possibilités créatrices longtemps incultes pourront enfin se développer. La question concernant le mode de vie que l’homme libéré, donc que l’homo lodens adoptera, ne peut être résolue parfai-tement en raison de la difficulté d’imaginer le monde artificiel que l’homme créera. L’homo ludens ne disposera pas seulement de la liberté du temps, ses mouvements dans l’univers seront également plus libres. Aucun travail ne l’attachant à une agglomé-ration déterminée et les moyens techniques nombreux mis à sa disposition lui permettant de parcourir les plus grandes distances, Allen l’homo ludens sera un nomade, dont le périmètre d’action sera le globe tout entier. Naturellement, cet homme exigera beaucoup de son milieu. Il revendiquera d’abord la révélation des regles du jeu et de la structure des nouvelles ambiances proposées échangeant ainsi le monde de la nature disoarue contre un entou-rage fantastique et multiple. Il créera artificiellement un monde technique, non pour concurrencer la nature, mais pour la dépas-ser par son caractère aventureux et sa richesse d’exploration. Dans la ville fonctionnelle d’aujourd’hui, nous sommes tout le temps à la recherche de quelque chose d’illégal. L’aventure existe encore mais elle confine sa présence dans les marchés aux puces, dans les restes des vieux quartiers, dans les bouges obscurs ou bien dans les salles de jeux et chez les marchands de glaces. Si nous voulons nous faire une image de la ville de l’homme libre et créateur, il faut peut-être procéder à une comparaison avec de telles zones qui semblent avoir échappé à toutes les actions des utilitaristes et des fonctionnalistes. Ces zones rassemblent tous ceux qui se séparent de la société ou qui sont refusés nar elle. Ce domaine social non fonctionnel peut étre considé é comme un réservoir de fermentation des goûts créateurs, comme un lieu qui exerce une grande attirance sur les touristes cherchant l’évasion. L’homo ludens à la recherche de l’inconnu et d’une nouvelle ambiance, ne reste pas passif comme le touriste qui se livre sim-plement à la rencontre dans la forme où elle se présente, Il dispose d’un monde dans l’espace et d’appareils techniques qui le mettent en mesure d’intervenir dans cet entourage pour le chan-ger et l’adapter à sa fantaisie. New-Babylon c’est le monde de l’homo ludens. L’exemple social de New-Babylon est entièrement adapté au changement perma-nent. Le caractère de l’entourage de New-Babylon s’exerce sur l’individu de manière à exploiter justement ses capacités, oppri-mées par la société utilitaire, tolérées dans une mesure limitée — comme c’est le cas pour l’artiste — avec l’intention de les intégrer lentement dans le système. New-Babylon c’est un monde flexible du plan de masse jusqu’au détail. New-Babylon c’est une ville ouverte, qui s’étend librement dans toutes les directions. Elle suit les traces laissées sur terre par l’homme lors de ses voyages. L’unité de construction de New-Babylon, le secteur, représentant le maillon d’une longue chaîne. Les chaînes du secteur sont enchevêtrées dans un réseau qui s’étend sur toute la surface du globe. New-Babylon n’est nulle part fermée, ne connaît pas de frontières et de barrières, chaque endroit est accessible à chacun. Les gens de New-Babylon traversent librement toute la terre, ils ne sont pas attachés à un endroit. Leur vie n’est qu’un voyage continu pendant lequel ils découvrent des aspects nouveaux et modulent leur vie. La construction de New-Babylon se fait lentement, secteur par secteur, en détruisant les zones anciennes selon les nécessités. Le plan de New-Babylon montre une répartition claire entre les secteurs et les surfaces laissées libres. Celles-ci sont indispen-sables pour une vie intense dans /es premiers et elles doivent êt-e accessibles à chacun. Le réseau des secteurs est un ensemble ininterrompu s’étendant comme une deuxième peau sur la surface de la terre. La construction de chaque secteur se limite à une structure de base de plans horizontaux vides et étendus. Le sol restera libre, les points de contact de la construction avec le sol étant réduits au minimum. En outre. la répartition intérieure de la construction devra offrir une liberté de composition totale. Selon les circonstances on préférera un type de construction sur appuis, sans éléments porteurs, ou suspendu. La construction de base sera répartie en un nombre variable de pièces plus ou moins grandes suivant les nécessités au moyen Johansen d’éléments mobiles. L’ambiance et la fonction des pièces sont très différentes et changent continuellement en fonction des acti-vités qui s’y déroulent. Ure partie du secteur renfermera des éléments habitables et des aménagements permanents, la plus grande partie étant réservée à la vie collective. Afin d’obtenir une grande souplesse d’utilisation un appareillage adapté sera nécessaire. A l’intérieur du secteur existera la liberté de créer artificiel-lement toutes sortes de situations développant ainsi un monde artificiel riche en contrastes. A chaque phase d’action, le New-Babylonien se trouvera en relation spontanée avec son environne-ment, car chaque geste se fera en public et concernera l’am-biance générale provoquant ainsi des réactions immédiates et spontanées qui engendreront aussitôtde nouveaux i x actes. A New-Babylon, chaque initiative créatrice de l’individu inter-viendra dans la vie collective et provoquera des réactions spon-tanées. Chacune de celles-ci en provoquant de nouvelles, il se formera une sorte de réaction en chaîne d’actes créateurs, qui ne pourront aboutir qu’en trouvant une gradation. Le point de grada-tion représentera ensuite un moment d’ambiance qui pourra être considérée comme création collective. Le rythme de la naissance et de la disparition des moments d’ambiance détermineront ainsi la proportion — espace — temps de New-Babylon. (Extrait du catalogue de l’exposition Constant, Kunsthalle de Berne, avril-mai 1966.) Hunziker Fôrderer Couelle Goldman Kowalski Dallegret Deaton Constant