—r – • Né en 1896 à Vienne, Frederick J. Kiesler y fit ses études à l’Ecole Supérieure Technique et à l’Académie des Beaux-Arts de 1910 à 1914. Elève et ami d’Adolf Loos, membre du groupe G et du Stijl, peintre, sculpteur, metteur en scène (R.U.R., l’Empereur Jones, 1922…), architecte, son premier projet de construction infinie fut exposé à Vienne en 1924, aux Etats-Unis en 1926. Naturalisé Américain en 1932, il resta directeur de l’Ecole de Musique Juilliard à New York de 1933 à 1957. Auteur de nombreux projets de théâtre (pour Woodstock 1932, pour Ellenville 1955. « Caramaoor » pour Katonati 1958), il a réalisé plusieurs galeries d’art (la galerie de Peggy Guggen-heim : Art of this Century, 1942…, la World house Gallery, 1956). Sa seule réalisation architecturale importante est le Sanc-tuaire du Livre étudié avec son élève et associé, Armand Bartos. Kiesler est mort cette année à New York. Toutes les recherches de Kiesler furent axées sur le même but : la poursuite de la continuité. Et la continuité signifie le refus de l’addition, de la juxtaposition inerte ; elle implique l’action, le mouvement, le parcours ; elle conduit à dépas-ser chaque fois le cadre défini d’un projet pour l’environnement, elle impose le souci de la « cor-rélation ». Corrélation entre les éléments, la vie et l’espace. Chaque étude débordera ainsi de son objet, chaque projet deviendra acteur d’un dyna-misme général. exemple, symbole, messager d’un concept fondamental. Ici, l’esthétique est remise à sa place : « Pour être valable, l’esthétique doit non seulement évo-luer en fonction de la structure, mais la struc-ture elle-même doit avoir été conçue à partir d’un contenu ; le contenu, voilà le point impor tant. » « Il est la force intérieure qui maintient en état de coordination tout le continuum de cou-leurs, formes, structures d’un espace. » Le contenu : la continuité. Sans cesse on re-trouvera cette idée fondamentale : dans le refus de la composition : colonnes, poutres, remplis-sages, dans la volonté de l’utilisation des ten-sions, du report des forces, de l’emploi des voiles, des membranes, des enveloppes conti-nues ; et cela jusqu’à l’absolu du dernier projet de la « Maison Infinie » : unique ruban enroulé sur lui-même. Patrice Goulet. De haut en bas • La ville dans l’espace, Exposition Paris. 1925 • Cinéma à New York, 1927-1928 • Gratte-ciel horizontal. 1925 • Grand magasin 1925 • Maison spatiale, New York, 1933 • Maison infinie, New York. 1933 • Galerie Peggy Guggenheim, New York. 1942 • Grotte de la Méditation, New Harmony, Indiana. 1966 • • Extraits de l’interview de F. Kiesler par Thomas H. Creighton publiée dans Progressive Architecture, juillet 1961. T.H.C. Quand avez-vous créé la maison infinie ? • Kiesler. Les trois années 1922, 1923, 1924 furent les plus fertiles de ma vie. Ce que je fais actuellement n’est que l’éclosion de mes idées d’alors. Je cherche toujours, comme je le faisais il y a quarante ans, une occasion pour les construire. J’avais commencé l’étude de la maison infinie pour le Festival du théâtre et de la musique de Vienne en 1924, avant même l’Optophon et la Cité dans l’espace. J’étais l’architecte et le responsable de ce festival. Les plans complets de ce projet lui auraient permis de recevoir 10 000 visiteurs dans une seule construction à double coque en « verre moulé ». Cette double coque devait contenir le chauffage et le conditionnement d’air et se composait d’un jeu de rampes, de plates-formes et d’ascenseurs, Une vitrine infinie à travers t’espace. Ce théâtre et centre musical devait comprendre égale-ment des hôtels, des parkings, des jardins, tous enclos dans la même coque. C’était un entrelacement continu de vastes rampes qui s’élevaient jusqu’à ce que, prati-quement, spectateurs et acteurs touchent le plafond. Les différents niveaux étaient aussi reliés par trois ascenseurs apparents; ces ascenseurs n’étaient que des plates-formes qui passaient d’un niveau à l’autre. Les acteurs et les spectateurs pouvaient se réunir n’importe où dans l’espace. Il y avait là, je le sens, un premier essai d’expression architecturale pour une intégration spatiale. Il exploitait à fond le principe de construction en tension continue — il n’y avait pas une seule colonne dans toute la structure. T.H.C. Avez-vous une formation ou des connaissances d’ingénieur ? ft Kiesler. J’ai suivi des cours à l’Institut de Technologie à Vienne. Mais la science de l’ingénieur devient souvent un des arts et métiers les plus réactionnaires de nos jours, manipulée par les professionnels, l’industrie et les normes du bâtiment. Il fallait un Eiffel ou un Fuller pour établir de nouvelles normes. T.H.C. Candela et Nervi — Torroja aussi — ont parlé de la conception intuitive dans l’art de l’ingénieur. Pensez-vous que ce concept soit souhaitable, est-ce qu’une telle chose existe ? • Kiesler. Sûrement ! Mais il faut un artiste-ingénieur pour concevoir de cette facon. Les toitures .,t,,t,r,s j’ai vues sont des mathématiques gelées. B’en que si-mulant des coques, elles ne sont en rJalii 5e_ toitures tordues, soutenues par une .io,s-siro.n.t…e de colonnes ; il n’y a pas de continuité, ,i structurale. Le règne des ossatures et [de -n,. _ est terminé, tout comme celui des dives( lyr , ‘es e colonnes. Soyons honnêtes; les satellites, les et les singes volants nous ont pris par su ori.e et 3in-tenant tout le monde s’intéresse à la )rtinsritt.