J tuméro 53 art et architect are ■ Mai-juin 1966 ■ 9 année I Bimestriel ■ tirage 7 000 ex. ■ Administration et rédaction : 5 rue Bartholdi 92 Boulogne Tél. 605-61-80 C.C.P. Paris 1519.97 IN Ce numéro spécial France 13 F. Etranger 15 F ■ Abonnement: 1 an 5 numéros: France 57 F. Etranger 14,10 dollars Nos lecteurs manifesteront peut-être quelque intérét et aussi de la surprise en prenant connaissance de ce numéro qui rompt délibérément avec nos propres habitudes. Face à la crise qui caractérise la situation des arts plastiques dans le monde, nous avons été amenés à donner une nouvelle orientation à notre revue. Nous entendons chercher des remèdes à cette situation en faisant appel à tous ceux oui déplorent le malaise actuel. La peinture et la sculpture ne jouent plus depuis longtemps qu’un rôle mineur. Commercialisés et soumis à une action publicitaire forcenée, ces deux arts ne concernent plus qu’une minorité asservie inconsciemment à des galeries, ou à de faux prophètes. Les vrais chercheurs sont découragés ou s’essouflent dans un monde où l’hurluberlu le dispute à une certaine forme de révolte, où les plaisanteries d’Ecole deviennent rapidement des vérités officialisées. L’architecture contemporaine qui semblait avoir pris un bon départ au début du siècle, a cessé le plus souvent trèfle un art pour devenir un métier profitable, qu’il s’agisse d’architecture fonctionnelle, standardisée, industrialisée ou non. Trop d’architectes reconnus dignes de ce titre par les gouvernements se contentent d’appliquer des formules à la mode et se démarquent mutuellement. Il serait injuste d’englober dans cette critique sévère quelques équipes courageuses dont certaines se livrent à une recherche pure et difficile dans des conditions de précarité. D’autres ont accepté une certaine conciliation pour subsister, mais limitent les concessions et réalisent des construc-tions qui sans être essentielles ne sont pas déshonorantes. Le bilan international reste maigre aussi bien en architecture qu’en art. Les responsables sont partout, dans la politique, la finance, les administrations et les bureaux d’études. Nous souhai-tons mener un combat énergique et clairvoyant avec l’aide de tous ceux qui souffrent comme nous des déficiences et qui souhaitent de travailler sans compromission pour exprimer en toute conscience un art authentique. Au moment où la population du globe s’accroit à une cadence inquiétante, la construction poursuit une activité aveugle avec tes seules considérations de l’économie, de la vitesse et du nombre. La société technocratique contemporaine tolère un passage étroit à ceux qui ambitionnent autre chose que des créa-tions scientifiques ou techniques. Les ressources issues de nouvelles découvertes des ingénieurs et constructeurs ne sont considérées que comme de nouveaux moyens d’exécution pour une production accélérée. L’urbanisme et l’architecture dont il est toujours question dans les propos, ne réussissent pas à se matérialiser et la qualité de l’environnement se dégrade de la façon la plus rapide. L’expression architecturale contemporaine qui avait cru trouver ses bases dans la Civilisation Machiniste ne parvient plus qu’à un piétinement. Les groupes célèbres comme ceux du Stilj hollandais, du Bauhaus allemand et des CIAM interna-tionaux avaient suscité beaucoup d’espoir, mais ils ont finalement abouti à une certaine sclérose dont de nouvelles indivi-dualités s’efforcent de nous éloigner. Conscients des difficultés actuelles, quelques sculpteurs se sont proposés de participer directement à l’élaboration d’une architecture vivante. Certains architectes se comportent eux-mêmes comme de véritables sculpteurs et leurs travaux constituent parfois des œuvres originales, dignes de notre temps, même quand les prouesses techniques n’ont pas été jugées essentielles. L’harmonie reste selon nous le critère fondamental de toute œuvre construite. Dans le marasme général des arts plastiques, la place occupée par les peintres et sculpteurs qualifiés reste des plus modestes. Leurs travaux sont suivis de près mais seulement par quelques milliers de spécialistes qui trouvent leur plaisir à collectionner quand ils le peuvent, ou simplement à visiter les Musées, les collections privées et les galeries d’art. Le rôle des artistes pourrait être plus important si un nouveau courant d’opinion, soutenu par une critique éclairée et par un public intéressé les aidait à participer plus directement à la création ou à la mise en ordre de notre milieu. A l’instigation de Le Corbusier et de quelques autres, on a parlé bien souvent de l’intégration ou de la Synthèse des Arts. Jusqu’à présent nous nous sommes surtout contentés d’intentions. La synthèse n’est pas une addition. Il ne suffit pas d’ajouter quelques œuvres peintes ou sculptées à l’architecture pour assurer la qualité des édifices. La revue e Aujourd’hui » donnera toujours le meilleur accueil aux vrais créateurs sans distinction de tendances, mais en recherchant surtout ceux dont les convictions et le travail sans compromission permettent les meilleurs espoirs. Dans la nouvelle version de notre revue nous n’entendons pas adopter une attitude négative ou de refus, mème lorsqu’il se produit des divergences d’opinions. Nous ne souhaitons pas imposer une nouvelle doctrine, mais nous désirons au contraire apporter une contribution efficace à l’élaboration du monde contemporain. Les valeurs réelles de la culture ne peuvent pas être laissées seulement entre les mains des fonctionnaires, ou des personnes en place. Peu impo des travaux c’est la qualité que nous demandons. Nous souhaitons que nos lecteurs apprécient nos Initiatives aident à mener un combat difficile. AUJOUR FiND ART DOC