Sculpture de Le Corbusier-Savina Sculpture pivotante dans un cadre qui fut modifié par la suite. 26 avril 1948 « Je me réjouis de voir de nouvelles choses sortir de notre tandem « L’atelier de la rue de Sèvres est maintenant arrangé. J’ai mis la plus petite des sculptures dans ma cellule personnelle. Je combine un éclairage utile. l’ai fait au fond de l’atelier une peinture de 16 m’ ,1 Nos statues allaient de plus en plus vers des assemblages de pièces. Faites ça comme une magnifique charpente et coque de bateau en bois. Le Corbusier n’admettait jamais l’à peu près .< polir et repolir le travail » disait-il. Ce que j'admirais chez lui, c'est que rien n'était laissé au hasard, le moindre détail était pensé, précis, c'est pourquoi ses oeuvres sont si fortes. Pour moi, il était comme un artisan méticuleux, passionné de son métier, oeuvrant autant de la tête que des mains, aussi je n'avais pas toujours que des louanges. 98 Dessin extrait d'une lettre. 19 mai 1948. Mon cher Savina, 2 juillet 1948 • Tenez-vous bien ! Je ne suis pas du tout content de votre statue n' 5. C'est terriblement décevant de voir que du n" 4 vous soyez tombé dans le n" 5. Le 4 était plein de dignité, de saveur dans le modèle, de soins et d'attentions apportés. D'esprit général, il était parfait : limpide. Je fais réserve sur la facture du cadre qui est trop mécanique (robot) et mérite d'être nuancé, galbé, etc. « (Repris depuis). Le 5 est retombé dans un art hâtif, et une inter-prétation cafarde d'extrait de calvaire breton. On retombe dans la tristesse des bois polychromes de la décadence gothique (XV'' siècle) dans les provinces étriquées. Esprit général : sans esprit. « Le 1 était excellent (avec des naïvetés), solide, sérieux, soigné. Le 2 était primesautier, plastique, heureux de rapports. • Le 3 à moitié de vertus et moitié d'échecs. • Le 4 excellent (cadre à reprendre). Le 5... un trou. • Nos sculptures (les miennes, mes dessins) n'ont aucun esprit gothique nordique ? Du roman, oui, du sel Attique, je crois. « Alors? Et bien, on continue, on remet ça, on soigne ! on se dit que toute oeuvre est incroyablement longue, difficile, sans pitié. Et ça recommence chaque fois (expériences de ma vie). 15 décembre 1950 « J'ai vu hier l'exposition Picasso, Maison de la Pensée Française. Magnifique. On y voit sa patience, sa recherche sur un thème ! Savina, la joie de l'artiste c'est de vaincre, d'aller jusqu'au bout, sur les genoux, crevé, écoeuré. Dix ans après, vous mesurez que vous avez fait une oeuvre valable. Ce qui me plaisait dans cette collaboration, c'est que j'avais une certaine liberté d'interprétation et d'invention des volumes. Comme ces statues étaient inspirées de dessins, il me disait quelquefois que le dos que j'avais inventé était mieux que le devant. En fait, il n'y a ni dos ni devant car une sculpture on doit pouvoir en faire le tour, comme celles de Laurens. Fin 1950 j'entrepris une sculpture de 1,22 m de haut s'inspirant d'un dessin du 2' numéro spécial de l' Architecture d'Aujourd'hui » page 87 intitulé étude pour une sculpture. 1942 ». La statue réalisée qu'il baptisa Totem », ne lui donnant pas satisfaction, nous échangeâmes pas mal de courrier à son sujet et, finalement, il me demanda d'aller passer quelques jours chez lui, avec mes outils pour faire les corrections nécessaires. Totem ". Décembre 1950 (haut. 122 cm). J'acceptais avec plaisir et je fis de même pour d'autres statues car en sa compagnie j'apprenais énormément de choses. Pour que je le comprenne, il m'expliquait la naissance de ses tableaux, de quoi ils étaient partis... un galet, un caillou, un verre, une bouteille, une vue de bateau, d'avion, etc. Le Totem était le fruit de la combinaison de trois tableaux, la partie supérieure un verre à col renversé. Le Corbusier travaillait avec peu de thèmes, mais ces thèmes avaient été tellement polis et repolis qu'il en avait tiré une foule de tableaux et dessins. Quelquefois, avec une pointe d'amertume il me disait : « On ne me tonnait que comme architecte, on ne veut pas me reconnaître comme peintre, et cependant c'est par le canal de ma peinture que je suis arrivé à l'architecture. C'était un grand observateur de la nature et c'est d'ailleurs le conseil qu'il me donnait toujours: « Prenez un carnet de croquis et regardez autour de vous. Pour ne pas avoir d'autres ennuis et pertes de temps comme avec le Totem, on changea de méthode de travail. Lorsque j'avais une idée de statue prise sur l'un de ses dessins ou tableau, j'en faisais un dessin grandeur d'exécution et lors d'un déplacement à Paris, je le lui soumet-tais, on en discutait, il me disséquait le sujet y apportant les corrections jugées nécessaires, ce qui me permettait de ne pas faire de faute d'interprétation et de bien posséder mon sujet. D'autre fois, c'est lui qui ayant une idée, me préparait des dessins grandeur d'exécution, j'ai quelques dessins de mains grandeur très difficiles de réalisation car, je n'arrivais pas à rendre le sentiment qu'il avait mis dans ses dessins. Les mains et les pieds, me disait-il, sont le plus c Je ne me souviens plus où je pris ce petit dessin pour en faire, en première étude, cette femme hauteur 45 cm. Je lui en adressai les photos.