Pol Mara. Peinture. 1959. royale et voies publicitaires. Par contre, les meilleurs d’entre eux béné-ficient la plupart du temps d’un intérêt à peine supérieur à celui que les plus médiocres suscitent aisément à Paris. C’est pourquoi la critique picturale n’est que bavardage et elle le restera tant que le creuset gigan-tesque, où se fondent reprises et repensées les expériences tentées ou réalisées de la préhistoire à nos jours, ne se trouvera épuré de toute structure et de tout substrat qui de près ou de loin empeste l’odeur de boutiquier. Il s’agit donc ici d’informer, sans plus, information sommaire d’ailleurs : quelques coups de sonde ne déterminent pas la nature d’un sol si étendu et qu’il faudrait fouiller pouce par pouce, méthodiquement. Un tel choix ne prétend davantage sélectionner quelques produits de valeur en se targuant de ce fameux bon goût qui n’est le plus souvent qu’un flair de commis-voyageur. Mouvements, émergences, fluctuations lentes où s’esquisse la courbe ascendante d’une vague nouvelle, confusion des choses vues… Un simple coup d’oeil où le futur reconnaîtra les siens. La nature colle aux toiles de Wyckaert, elle y adhère de toutes ses teintes de soleil, de glèbe, de moisson, d’épaisse verdure et de bleu horizon. Les couleurs du monde sont comme aspirées par un courant qui les brasse, les condense, les resserre avec la prodigieuse intensité de l’art flamand, dans le cadre étroit d’un tableau, vitre où transparaîtraient sou-dain, réduits en un instant unique, une multitude d’espaces longuement caressés par le temps. Chaque touche vivement colorée épouse un gra-phisme qu’un mouvement plus ample et souvent ascendant draine avec force vers un seuil de lumière bleue, une épaisse fragmentation, une halte avant la coulée paisible du « ciel » dont l’uniformité semble rythmer en longs accords le déferlement sauvage des teintes. Même attachement au monde extérieur chez De Buyst et De Taye. Très jeunes encore, ces deux peintres se signalent par une rigueur de construction, une volonté de structurer, sans lui ôter sa force passionnelle, l’élan né d’une rencontre poétique entre le regard et l’univers : le frémissement des teintes submerge les esquisses initiales en s’inspirant d’elles comme de lignes de force chez De Buyst, alors que les tons se fondent chez De Taye au départ d’éléments figuratifs, ou encore définissent des volumes assez fluides et très librement équilibrés sur une base à l’origine géométrique. A ces trois noms s’opposent, dans la démarche mais non dans l’esprit. ceux qui recréent le monde au-delà du rytme incantatoire des formes. Etrange alchimie que celle où se matérialisent soudain, parmi l’enchevêtre-ment d’une musculature linéaire et l’inervation brutale des teintes, les linéaments d’une figure humaine, le cortège menaçant d’une bacchanale ou le masque torturé d’une de ces créatures blottie au fond de notre esprit. Maître du Grand Œuvre futur, Alechinsky maintient inlassablement la forme dans les méandres logiques de ses passions. Dans le vif de sa toile il sculpte un monde nouveau, avec son climat, ses conditions de vie. Pol Mara. Peinture. 1959. ses lois propres, et comme oscillant entre l’Etre et le Devoir-Etre. Il y a chez lui une telle cohabitation de la pensée, des sentiments et de la technique picturale qu’on ne résiste pas au plaisir d’évoquer le tumulte ordonné où s’agitent, embués d’une atmosphère très ensorienne (bleus, blancs, verts, rouges…), les masques à demi dissous de figures et d’objets au seuil de la naissance, déjà. Dans la peinture flamande, mondes intérieur et extérieur coïncident. Roel d’Haese ne manque pas à la tradition. Edouard Jaguer a parlé très justement ici même de ce sculpteur étonnant dont les dessins adoptent depuis peu les tournures incisives de ses bronzes. Le fantastique habite ces formes tournantes, comme racornies, rognures d’ongles très longs recourbées dans la chair du dessin. Ce sont des scènes étranges où se jouent avec dextérité et finesse (la finesse du trait) des drames invisibles, véritables sortilèges graphiques, tourbillons désaxés, serpents lovés, cheveux, spirales, becs, serres solidement enfoncées… On dirait des Daumier où l’anecdote et les personnages se seraient effacés, laissant les âmes nues et les caractères à vif. Richard Lucas, lui aussi, part à la découverte de terres nouvelles, d’objets réels et mouvants, d’une figuration libre de toute convention traditionnelle. Le geste règne, large mais sans cesse maîtrisé, brisé, recomposé, assimilé à l’ensemble, dessi-nant sur un rythme de tortà heurtés ou fondus en surimpression une syntaxe rapide où le regard s’enrichit à chaque virevolte d’un nouvel angle de vue. Lucas joue des reliefs, des profondeurs et des entrelacs nerveux avec une sorte de volonté d’étreindre, d’accrocher un objet inexprimable encore mais déjà défini par une atmosphère, par une technique de création. Une lumière tout intérieure illumine l’ceuvre de Jacques Lacomblez. Le rêve y confère la dimension du vécu à des visions cosmiques, à des règnes inconnus empruntant au végétal et au minéral une existence commune. Lacomblez possède ce charme pictural qui nous rend l’indistinct plus proche. plus docile, le velouté des tons souvent crépusculaires attire et fascine le regard jusqu’à l’emprisonner dans le monde étrange et effrayant de ceux qui chuchotent dans les ténèbres ». A travers un univers reptilien stra-tifié dans une coulée hiératiquement lapidaire, des tentacules minéraux se lovent, glissent lentement, laissant çà et là des traces de leur passage, -des terriers dont les yeux crevés brillent d’une clarté noire. Rien de gluant, rien de visqueux, mais une sorte de mollesse rugueuse, de madrépore étoilé envahissant la toile avec un orgueil conquérant. Tout respire la mort et la vie, la damnation et le salut, le sang qui bouillonne dans ces arcanes vient du sacrifié comme du sacrificateur, car c’est au rivage de notre propre inquiétude que Lacomblez nous contraint d’aborder. Sous le signe des fulgurances nordiques et de Karl Otto GCitz, Marie Carlier nous convie voyage et à la voyance intérieure. Un grand tourbillon aspire le regs jusqu’au lointain où filtre une lueur mystérieuse, les teintes suscitent de la lumière changeante des présences féeriques, des formes indécises FIND ART, DOC