FIND ART DOC’ La peinture figurative parle, trop souvent même elle parle de tout, sauf de peinture ! La pein-ture abstraite géométrique, elle, se tait. Quant et la peinture abs-traite tachiste, ambivalente, elle relève à la fois du silence de son aînée et d’une abondance de sug-gestions concrètes. Abstraitement, en effet, le ta-chisme n’a pas de sujet, moins encore que le géométrisme, qui a ses « figures ». Mais il est de la nature de la tache de proposer à l’imagination, de par son « infor-mel » même, un grand nombre de possibilités. L’interprétation du tachisme est donc des plus variées. On le voit bien ici, où Hartung et Pra-chensky se donnent l’air, malgré eux, de jouer « Le Rouge et le Noir ». Il était fatal que le géométrisme, après avoir rajeuni la peinture par l’impeccabiiité colorée et une grande pureté spirituelle, aboutît chez les épigones, à un purisme desséchant. Aucun euclidien ou riemanien d’hier ne voudrait s’en tenir là. Hartung a pu s’affran-chir de bonne heure. Plus linéaire que surfacier, et dans la linéarité, moins tire-ligne que poil de pin-ceau, il a gardé l’esprit du dessin, art de l’intelligence, dans la pein-ture, art de la matière. C’est dire qu’il sait ce qu’il veut et jusqu’où il veut mener cet informel dû pinceau, autorisé à peinturer la toile, comme dans le bâtiment, mais non uniformément. La brosse doit, au contraire, montrer son côté chaotique et sinon ses dents, du moins ses bavures. Aussi Hartung a-t-il abouti à un style : le style des balafres. De même Mathieu, dont l’oeuvre re-lève aussi du graphisme, a abouti à un style de paraphes. Le style de Prachensky est tout autre. Ici sa tâche fait penser aux « Péninsules démarrées » dia « Bateau Ivre » rimbaldien. Rè-tournée horizontalement du côté gauche, au lieu de la carte d’une presqu’île très découpée et lacus-tre, elle devient un groupe san-glant soudé par l’uniforme rouge. Vu du côté droit, le groupe a dû s’enivrer et se battre. Plastique-ment, c’est le plus mouvementé. Il y q moins de « dirigisme » chez Prachensky, moins d’intel-lectualisme aussi, bien que, dans la préface de son exposition, l’ar-tiste jargonne philosophiquement, sans atteindre, même de loin, à la virtuosité de Michel Tapié. Mais il possède plus de sugges-tion magique, ce qui est tout de même le but, surtout dans le terre-à-terre chtonien de l’infor-mel. Que la peinture soit repré-sentative ou abstraite, la perfec-tion n’est pas suffisante. Il faut, de plus, ce sens de l’infini, qui est en train de transcender les plus audacieuses recherches d’au jour-d’hui. Pierre GUEGUEN. • • 4 • PRACHEN