Amsterdam .• n.. 52. Peinture 1903. KANDINSKY Rapallo Peinture 1906. Exposition au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles de 45 oeuvres de Kandinsky provenant du Solomon R. Guggenheim Museum, New-York. REFLEXIONS SUR L’ART ABSTRAIT (EXTRAITS) Texte ne Kandinsky servant de préface à cette exposition publié pour la première fois par Christian Zervos dans Les Cahiers d’Art » n— 7-8, 1931). Les peintres « abstraits » sont les accusés, c’est-à-dire qu’il leur faut se défendre. Ils doivent prouver que la peinture sans « objet » est vraiment de la peinture et a le droit d’existence à côté de l’autre. Cette façon de poser la question est inexacte et injuste. Je serais tenté de retourner la question et de demander aux partisans exclusifs de la peinture d’objet de prouver que leur peinture est la seule véritable. En d’autres termes : que les partisans de la peinture d’objet prouvent que l’objet, en peinture est tout aussi indispensable que la couleur et la forme (au sens restreint), sans lesquelles la peinture ne saurait s’imaginer. L’expérience de différentes époques a produit des peintures qui ne recoururent pas à la présentation et qui ainsi augmen-tèrent particulièrement la valeur des éléments indispensables : forme et couleur. Quelques-unes de nos peintures « abstraites » actuelles sont au meilleur sens du mot douées de vie artistique : elles ont la pulsation de la vie, le rayonnement et exercent une action sur l’intérieur de l’homme par l’intermédiaire de D’une manière purement picturale. De même, il n’y a parmi les innombrables peintures actuelles sans objet que quelques-unes qui soient douées de vie artistique, au meilleur sens du mot. Je voudrais remarquer brièvement que l’étiquette « abstrait » induit en erreur et est nuisible tant qu’on la prend à la lettre. Mais autant que je sache, l’étiquette « impressionnisme », fut en son temps imaginée et employée pour tourner ce mou-vement en dérision. Ce terme « cubisme », pris littéralement, est une banalisation nuisible de ce qu’il y a de nouveau dans le cubisme. Les reproches que l’on adresse à la peinture « abstraite » me sont depuis longtemps connus. Elle serilit une impasse : les impressionnistes, les cubistes, les expressionnistes et les post-impressionnistes n’ont-ils pas dû entendre absolument les mêmes prophéties ? Toutes ces « ten-dances » — c’est ainsi qu’on appelle d’ordinaire les révéla-tions — ont été considérées par la presse, le public et les artistes eux-mêmes comme « anarchiques » (il n’y avait pas alors de bolchévisme) qui menacent et détruisent le principe « éternel » de la peinture. On se consolait en disant qu’elles aboutissent à une impasse. On affirma que les impressionnistes abaissent l’art par leur amour du paysage, et que cet amour correspond à une décroissance catastrophique de la force créa-trice. On ne parlait pas seulement d’impasse, mais de mort 4 de la peinture, etc., etc. Quant à des exemples, il n’est pas dif-ficile d’en trouver dans l’histoire de l’art. La nature de l’art reste à jamais immuable, qu’il s’agisse de la peinture ou de la musique, par exemple. Serait-il possible de trouver un homme pour soutenir que le lied Ou l’opéra répondent seuls à la véritable essence de la musique, et que la musique symphonique pure soit intellectuelle, et artificielle et aboutisse à une impasse. Il fut un temps où l’on entendit de telles affirmations. • Ne mène à des impasses que ce qui tourne le dos à l’esprit, tandis que ce qui naît de l’esprit et le sert, ouvre toutes les impasses et mène à la liberté. Malheur à qui s’en remet uniquement à la mathématique, — à la raison. La loi fondamentale qui régit la méthode de travail et les énergies du peintre « avec objet » et du peintre « sans objet » est absolument la même. Les oeuvres normales de la peinture abstraite jaillissent de la source commune à tous les arts : l’intuition. La raison joue dans tous ces cas le même rôle : elle colla-bore, qu’il s’agisse d’oeuvres copiant ou non des objets, mais toujours en facteur secondaire. Les artistes qui se disent « purs constructivistes » ont fait des essais divers pour construire sur une base purement matérialiste. Ils cherchèrent à éliminer le sentiment « périmé » (intuition) pour servir le temps présent « raisonnable » par des moyens qui lui soient adaptés. Ils oubliaient qu’il y a deux mathématiques. Et en outre ils ne purent jamais établir une formule nette qui répondit à toutes les proportions du tableau. Ils étaient ainsi forcés ou bien de peindre de méchants tableaux, ou bien de corriger la raison par l’intuition « périmée ». Géométrie. — Pourquoi une peinture dans laquelle se reconnaissent des formes « géométriques » est-elle dite « géo-métrique », alors qu’une peinture où se reconnaissent des formes végétales, n’est pas dite « botanique » ? Ou bien peut-on dire « musicale » une peinture où l’on peut distinguer sur une toile une guitare ou un violon ? On reproche à quelques peintres « abstraits » de s’inté-resser à la géométrie. Lorsqu’il me fallait étudier l’anatomie à l’école de peinture (ce à quoi je n’avais guère de goût, tant l’enseignement du professeur d’anatomie était ,,e.n•,.1.) mon maître Anton Azbe me disait : « Il vous fau l’anatomie, mais devant votre chevalet, il vous faut ND ART DOC