Kandinsky <, Rouge-Bleu Aquarelle 1913 (Collection N. K. Paris). Reproduit avec le consentement de la Galerie Maeght, Paris. Penser, agiter le pinceau sans intention de faire un tableau, c'est posséder l'art de la peinture. » Ce précepte chinois des T'ang semble définir, plusieurs siècles à l'avance, la calli-graphie lyrique de la première aquarelle « concrète » de Kandinsky dont celle-ci a la vivacité aiguë et les fraîches dissonances. Sans doute fallait-il, pour traduire les impulsions instantanées, les courants et les contre-courants d'une sensibilité délivrée de toute entrave, que le pinceau chargé d'encre ou de couleur glissât presque sans poids afin de se précipiter à l'essentiel. Ce n'est plus l'image du mouvement qu'il s'agit de rendre, c'est le mouvement lui-même, saisi à sa source et dans les variations de son rythme. , Sur la feuille à peine effleurée, les touches, les traits renflés ou déliés, les paraphes fluides, les formes transparentes viennent se poser et s'improvisent. Des nappes de jaune et de bleu laissent encore entre elles quelques étendues blanches. Mais, bientôt, des coulées tourbillonnaires, des incandescences solidifiées rempliront ce vide de la couleur. Le rouge flamboiement hérissé deviendra le foyer de métamorphoses qu'une géométrie passionnée et rigoureuse contiendra, ordonnera en constructions formelles. Cette première éclosion annonce déjà toutes les audaces futures. Elle les contient en germe. Le peintre, d'emblée, est allé jusqu'aux limites de son art et, peut-être, de l'art. gla qu'on fasse désormais, tout est dit. Pierre VOLBOUDT.