Tout d’abord très affecté de n’avoir pu découvrir le secret de la fabrication de l’or, Auguste II donna libre cours à sa joie d’avoir trouvé une nouvelle pierre philosophale, la porcelaine. Si le sort n’a pas permis à Botter de devenir le créateur de l’or, il dut au hasard d’être celui de la porcelaine. Celle’ci faite d’une terre grossière, était recouverte d’un émail de teinte bleuâtre. Béittger espérait que sa découverte lui permettrait de recouvrer la liberté. Mais Auguste le Fort désirait en conserver jalousement le secret. Aussi transféra,t,ilson prisonnier au château de Meissen, à proximité des lieux mêmes où se trouvait la terre dont il faisait usage. Meissen, petite bourgade baignée par l’Elbe, située près de Dresde, était dominée par un château féodal « Albrechtschloss », ancienne résidence des margraves. Auguste y installa Béittger dans le plus grand luxe, mit à sa disposition un nouveau laboratoire et le four le plus perfectionné et lui adjoignit des ouvriers prisonniers comme lui. Dans sa nouvelle geôle, l’inventeur se mit au travail. Ainsi, en 1710, le roi de Saxe créait la Manufacture de Porcelaine de Meissen. A l’entrée de son atelier, l’alchimiste avait inscrit: « Dieu,le Tout Puissant Créateur a fait d’un fabricant d’or un potier ». Ni les festins, ni les réjouissances ne manquaient à Biottger. Auguste lui procurait à domicile, tous les plaisirs qu’un homme de son âge pouvait désirer. Mais, plus encore qu’à Dresde, Bouger souffrait du manque de liberté. Le roi fit de la fabrication de la porcelaine un véritable secret d’État; ceux qui auraient divulgué le procédé seraient punis de mort. Les domestiques et les ouvriers devaient prêter serment sur la Bible. Le roi lui/même, en pénétrant dans la manufacture, prononçait la parole convenue : «La discrétion jusque dans le tombeau». Si le hasard favorisa la première découverte de la porcelaine, il fut vraiment miraculeux pour Béittger en lui permettant de perfectionner son procédé et d’obtenir une porcelaine semblable à la fameuse porcelaine de Chine. Une véritable légende s’est créée au sujet de cette découverte : &enter portait une perruque poudrée, suivant la mode de son temps. Un jour il chargea son domestique de lui acheter, chez le droguiste, de la poudre pour ses cheveux. Au cours d’une manipulation, une petite quantité de cette poudre tomba par hasard, de la chevelure de Bâttger dans le creuset. Il s’y forma instantanément une petite masse solide, d’une éclatante blancheur. L’alchimiste examina alors la poudre qui avait formé ce précipité. Il en conclut que le droguiste s’était trompé en délivrant de la poudre de Kaolin à la place de poudre de riz. Ce hasard nouveau avait permis à Bâttger, de découvrir le secret de la fabrication de la porcelaine blanche d’Orient. Ayant enfin pleinement satisfait le roi, Bidtger le supplia de lui accorder sa liberté après treize années de captivité, invoquant ses souffrances et ses sacrifices. Auguste II touché par ses supplications, accéda à sa demande. L’inventeur dejà malade, se livra alors à des excès de boisson qui hatèrent sa fin. Il mourut en 1719, à l’âge de 34 ans. Le secret de la fabrication de la porcelaine appartenait à la Saxe. La Manufacture de Meissen devait devenir une merveilleuse source de richesse pour le pays et acquérir une réputation mondiale. Malheureusement, le secret si jalousement gardé fut dévoilé, peu de temps avant la mort de son inventeur : un des ouvriers, bien qu’il eut prêté serment sur la Bible, avait vendu le secret au roi de Prusse. Après la mort de Bouger, Auguste le Fort mit à la tête de la Manufacture de Meissen, un peintre de talent, nommé Hérold. Celui/ci donna un grand essor à la décoration des plats et services de table, en introduisant l’emploi des couleurs vives. C’est en 1720, qu’apparaît le décor polychrome ; Hérold parvenait à éclairer la blancheur de l’émail. Auguste II, qui fut surnommé non seulement le « Roi du Baroque », mais encore le « Roi de la Porcelaine », fut un véritable animateur et un grand mécène. Il mourut en 1733. Son fils, Auguste III, qui lui succéda, fut si enthousiaste de la porcelaine, qu’ il se fit construire sur les rives de l’Elbe, un Palais Japonais entièrement décoré par de la Porcelaine de Meissen. Il mit le sculpteur Kandler à la tête de la direction de la désormais célèbre manufacture. Sous sa direction qui dura de 1735 à 1776, soit pendant 41 ans, se formèrent ce style et ce goût, qui, dans la céramique, furent universellement connus sous le nom de Porcelaine de Saxe. Dans de vastes ateliers, sous la surveillance d’habiles artistes, plus de 700 ouvriers produisaient non seulement de délicats ustensiles de table, mais aussi des pendules, qui étaient fort à la mode à cette époque, des statues, des statuettes, d’amusantes figurines représentant des bergers et des bergères, des frivolités pastorales, des scènes galantes, tout ce petit monde gracieux et adorable, véritable sourire du XVIlle siècle. Les animaux, dont les sujets de la remarquable ménagerie d’Auguste servaient de modèles, furent très souvent reproduits par Kandler, avec un réalisme saisissant. Sous sa direction, le genre de fabrication le plus apprécié fut celui des groupes et des personnages. Les premières figurines imitant les acteurs de la « Comédie Italienne » sont remarquables par l’éclat de leurs couleurs, l’élégance de leurs gestes et de leurs mouvements et par les charmantes attitudes de grâce et d’abandon. Les costumes, qui habillent ces petits personnages sont très somptueux. Les expressions des figurines sont d’une tris grande vivacité. Les couleurs employées par Kandler sont riches en nuances variées : les tons noirs, bleus, rouges et lie de vin, qu’il employait, sont aujourd’hui introuvables. Au cours de la Guerre de Sept ans, le grand Frédéric fit piller la fabrique de porcelaine et dévaster les collections de Dresde, en emportant les figurines de Saxe. Après la mort de Kandler, le français Michel-Victor Acier fut appelé à Meissen, en 1764 en qualité de directeur. Il modela une série de figurines qu’on appela « Cris de Paris», statuettes représentant les petits métiers parisiens : bouquetières, poissardes, crieurs de rues, personnages d’une amusante variété. Depuis cette époque, le goût français règne en Saxe. E. DE MONDESIR VASE A L’EFFIGIE DE LOUIS X% EXÉCUTÉ PAR KANDLER POUR LE ROI DE FRANCE VASE A DÉCOR FLORAL EXÉCUTÉ POUR FRÉDÉRIC LE GRAND PAR KANDLER CHIEN BOLONAIS PAR KANDLER