mise à la mode, m’a dit mon petit doigt, par le triumvirat Poiret-Domergue-Bénédictus), mes regards furent retenus par la décoration des murs. Décoration vous semble un bien grand mot sans doute puisqu’il ne s’agit, en l’espèce, que de quelque coin de caserne aux parois blanchies à la chaux. Et cependant, quel que soit mon désir de vous être agréable, je ne puis, pour vous satisfaire, trouver un autre vocable. En effet, loin de nous offrir les classiques calendriers de la classe où un piôupiou joyeux s’écriait : « Tant de jours demain à la soupe », loin de nous offrir, aussi, des photographies format cartes postales et représentant les traits de Mme Sarah Bernhardt dans Piti,g/on, de Mme Réjane dans Za:q, ou de M' »e Bobinne dans le Passant, les murs du bureau de la 5e compagnie présentaient à nos yeux ravis une suite de •c< 28 gravures aux teintesIvives "et:aimables dont «l'ensemble — fleurs et fruits — n'aurait pu qu'enchanter le pluS sévère critique. Flatté sans doute de l'attention que j'appor-tais à sa décoration, le sergent-fourrier de J... jugea séant de m'entretenir de ses murs avant même de me demander la raison pour laquelle j'étais venu le déranger. — 11 ne s'agit point, dit-il, d'aller chercher des choses rares. La présentation, selon moi, est plus précieuse que l'objet d'art lui-même, mais peut-être aussi plus difficile à obtenir et surtout à réussir... Et comme de J..,, justement, décrochait en ma faveur quelques gravures, je pus alors m'apercevoir que ces fleurs si joliment repré-sentées, si gracieuses, si féminines, portaient des marques, des numéros indiquant qu'elles 'avaient été arrachées d'un de ces albums si fort en vogue au début du xi): siècle. • Certaines planches étaient signées : Oudart, Jullien, Atm' Vincent, Annica Bricogne — mais la plupart portaient le nom de Redouté, le maître incontesté du genre (sur-nommé à l'époque le Raphaël des fleurs), à qui nous (levons les célèbres albums : « Les Liliacées .», « Les « Les plantes de la Malmaison ». D'autres même prove-naient du « Journal des demoiselles », et laissaient aper-cevoir, par transparence, un article de « Tante Aurélie ». Devant ma surprise de plus en plus grande — et visible je pense — Jean-Louis commença alors à ma seule intention une profession de foi de parfait décorateur. Je vous en ferai grâce. Aussi bien vous la connaissez puisque, depuis, revue, augmentée et corrigée, cette profession de foi a été livrée aux foules et a fait, peu ou prou, la fortune de son auteur. Je ne crains point d'ajouterqu'ill'a méritée grandement.